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Stratégie gagnante : croire en sa propre voix

Et si la clé de la stratégie gagnante résidait dans notre capacité à croire en notre propre pouvoir d’action ?
Merci à Michaël V. Dandrieux qui, dans un de ses posts, insiste dans son post sur la nécessité pour les entreprises de se réinventer en affirmant leur singularité comme l’affirme son titre :
« L’opposé du courage, ce n’est pas la lâcheté, c’est le mimétisme. »
Voilà qui résonne profondément, en moi, avec une notion chère à la psychologie et au management : le locus de contrôle interne.
Croire en son pouvoir d’action
Ce concept, théorisé par Julian Rotter en 1954, distingue ceux qui croient maîtriser leur destin (locus interne) de ceux qui l’attribuent à des forces extérieures (locus externe).
Pour une entreprise, comme pour chacun de ses acteurs, c’est une question de posture stratégique :
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Une organisation qui cultive son locus interne affirme sa voix, trace sa route et s’impose sur son marché par des choix délibérés, plutôt que de subir les tendances.
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Des collaborateurs imprégnés de cette même conviction osent innover, prendre des initiatives et s’engager pleinement, car ils se sentent acteurs de leur succès.
Développer le locus interne à tous les niveaux
Un défi autant stratégique que managérial :
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Choisir le cap de l’entreprise en alignement avec l’étoile de sa vision
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Donner du sens aux actions individuelles et collectives
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Déléguer la responsabilité et valoriser l’autonomie
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Aligner la culture d’entreprise sur une vision claire, où chacun comprend son impact
Du mimétisme au courage
Comme le souligne avec justesse Michaël V. Dandrieux :
« La lâcheté, le chemin de la moindre résistance, c’est le mimétisme. »
À l’opposé, c’est en croyant en notre capacité à influencer le cours des choses – en tant qu’entreprise comme en tant qu’individu – que nous transformons les défis en opportunités.
Alors ayons le courage de notre individualité !
Merci encore à Michaël V. Dandrieux pour ses interpellations inspirantes.
#Leadership #Stratégie #Management #Innovation #LocusDeContrôle
Quand la fêlure devient force : plaidoyer pour un management de la fragilité

Un praticien au cœur des vulnérabilités organisationnelles
François Chauvin n’est pas un théoricien en chambre. Fort d’une expérience multiforme – responsable RH, chef d’établissement, manager de projets immobiliers, intervenant dans le secteur du handicap – ce formateur et coach a côtoyé la fragilité sous toutes ses formes : dans les usines, sur les chantiers, au sein d’équipes confrontées à des contextes économiques difficiles. Son livre Faire avec la fragilité résulte d’une enquête approfondie menée auprès de 37 témoins : chercheurs, DRH, dirigeants, syndicalistes, artistes, sportifs, et même un moine zen. Cette diversité de regards constitue la richesse d’un ouvrage qui refuse les recettes toutes faites pour privilégier l’expérience incarnée.
Un voyage en fragilité
François Chauvin nous offre avec son livre « Faire avec la fragilité » publié aux éditions EMS un voyage en fragilité. Tout au long du chemin, il nous propose de découvrir et de visiter chacune des situations de fragilité d’une organisation, d’une équipe, d’un collaborateur, et des nôtres en réaction à ces fragilités — sans oublier d’explorer nos propres fêlures. Ce voyage nous fait prendre conscience que, pour « allier la robustesse à la performance », il nous faut faire évoluer nos représentations de la fragilité et intégrer cette fragilité non comme un accident, mais comme une donnée du management. Ce qui paraît évident au niveau personnel — bien que souvent nié tant l’image du manager-héros a été entretenue — devient plus déroutant lorsque Chauvin montre avec pertinence que la fragilité doit aussi être prise en compte au niveau stratégique, organisationnel et culturel de l’entreprise.
De la négation à l’intégration
La proposition centrale de François Chauvin bouleverse les fondamentaux du management classique : au lieu de combattre ou de nier la fragilité, il faut apprendre à faire avec. L’auteur distingue la fragilité (constitution interne de faible résistance) de la vulnérabilité (exposition à un danger extérieur) et montre leur interaction permanente. Selon l’étude Malakoff Humanis citée, 44 % des managers estiment qu’au moins une personne dans leur entreprise est en situation de vulnérabilité professionnelle, et près de 7 sur 10 identifient des fragilités personnelles parmi leurs collaborateurs.
Cette fragilité n’est donc pas une faiblesse à éradiquer, mais une donnée à intégrer dans les stratégies et les pratiques managériales. Pour François Chauvin, une entreprise performante n’est durablement robuste que si elle assume ses zones de fragilité.
La métaphore du Kintsugi
À l’image du Kintsugi japonais – cet art de réparer les céramiques brisées avec de la laque saupoudrée d’or – le livre ne fait pas l’éloge d’une posture victimaire mais propose d’assumer nos cicatrices pour en faire une force. En management, reconnaître les fragilités partagées permet de construire des relations authentiques et des collectifs solides. Ainsi et de manière contre intuitive, accueillir nos faiblesses nous renforce.
Les idées-forces d’un management conscient
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La fragilité crée des relations authentiques. En acceptant nos limites, nous ouvrons la voie à la confiance et à la coopération véritable.
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Le “non-agir” comme compétence managériale. Inspiré du taoïsme, François Chauvin montre que savoir attendre, écouter, et accueillir l’imprévisible peut être plus fécond que l’hyper-contrôle.
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L’imperfection comme moteur de développement. Le perfectionnisme fragilise ; le « suffisant collectif » renforce.
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La gratitude comme antidote. La joie et la reconnaissance des contributions consolident la résilience collective.
Chaque chapitre est une étape sur ce chemin de découverte. Chacun mêle théorie, témoignages et pratiques, avec des questions pour l’auto-analyse du lecteur.
L’ouvrage se garde d’un éloge naïf de la fragilité mais ouvre une L’ouvrage se garde d’un éloge naïf de la fragilité mais ouvre un débat essentiel. Le risque d’une psychologisation excessive existe, tout comme celui d’un idéalisme difficile à concrétiser dans certains contextes industriels ou hiérarchiques. Mais le message demeure puissant : la fragilité n’est pas un défaut à corriger, c’est une composante de l’humain et, à ce titre, une ressource de management.
Un appel à la conversion du regard
François Chauvin ne propose ni recette ni modèle. Il invite à un changement de regard : passer de la fragilité-problème à la fragilité-donnée, de la fragilité-faiblesse à la fragilité-ressource. À l’instar du Kintsugi, il nous rappelle que la solidité naît de la reconnaissance des fissures, non de leur déni.
Ce voyage en fragilité, en nous apprenant à « faire avec », nous renforce.


Manquer de souffle, manquer de sens

Un titre qui interroge et inspire
Un article de Jérôme Lecoq attire mon attention, autant par la richesse de son propos que par son titre : « Quand la pratique manque de souffle ». À sa lecture, et au vu de la situation étudiée dans l’article, je me demande si le titre « Quand la pratique s’essouffle » ne conviendrait pas mieux ici. Car entre « manquer de souffle » et « s’essouffler », il y a une nuance essentielle qui éclaire bien des situations.
Quand la pratique s’essouffle
Il arrive que nous reconnaissions un problème — un essoufflement, une fatigue, une perte de repères. Ce problème, souvent, n’est que le symptôme d’un déséquilibre plus profond. Comme le coureur qui s’arrête au bord de la piste, nous cherchons alors de l’aide : coach, philosophe, psychologue, consultant… Ces arrêts sont salutaires : ils permettent de reprendre souffle.
Quand le souffle manque vraiment
Mais il existe un autre cas, plus inquiétant : celui du manque de souffle, au sens d’absence ou de perte d’âme ou de projet. Ce manque ne fait pas mal tout de suite, il s’installe. Le projet tourne à vide, la répétition remplace la vision, et la personne comme l’organisation s’enlisent dans un décalage croissant avec le réel. Là, le risque n’est plus de s’arrêter, mais bien la « sortie de route ».
Le questionnement lucide, une pratique vitale
Se questionner sur la pertinence de sa perception et de ses décisions est un exercice vital. Inutile de l’habiller de grands mots : philosophie, psychologie, sociologie… Il s’agit simplement d’une vigilance active. Posons nous cette question simple et apportons y une réponse qui nous engage :
« La façon dont je perçois ma situation — et les décisions que j’en déduis — est-elle pertinente pour le futur que je veux construire ? »
Et là se trouve souvent le cœur du sujet : quel est ce futur voulu ? Pas rêvé, pas fantasmé, mais voulu, choisi, assumé.
Humanisme pragmatique : le souffle de l’entrepreneur
Ce questionnement n’est pas une posture intellectuelle, c’est le cœur même de l’acte d’entreprendre. Certains y voient de la philosophie, moi j’y vois un humanisme pragmatique : agir en conscience, dans le réel, pour faire advenir ce que l’on veut vraiment et que l’on fait tout pour y contribuer.
Retrouvons le souffle du sens
Merci à Jérôme Lecoq d’avoir suscité cette réflexion. Et si nous prenions, chacun, quelques instants pour interroger notre propre souffle — celui de nos pratiques, de nos projets, de nos organisations sana attendre qu’ils nous forcent à nous arrêter, faute de souffle ? Le retrouver, c’est déjà reprendre la route avec justesse et intention.


Décisions de carrière : quel savoir face aux situations décisives ?

Une démarche innovante et à encourager
Quelle belle idée Guillaume Rosquin que d’afficher ainsi les traces de sa réflexion et de les mettre à la critique et/ou complémentation de quiconque y trouve un écho. C’est une démarche rare, innovante et à encourager.
Voici, alors qu’il se questionne sur les décisions de carrière la mindmap qu’il nous propose et qu’il soumet à notre réflexion :

La place du savoir et de l’ignorance
Concernant les parcours professionnels, une première remarque serait de sortir « l’Ignorance » du pavé « Repoussoir ». Elle mérite un pavé à part entière, car il s’agit d’une ignorance par absence de connaissance, différente d’une ignorance volontaire, qui elle peut rester un repoussoir.
Un pavé central : le savoir
À l’inverse, la composante « Savoir » pourrait être isolée du pavé « Attirance » pour devenir une cause en soi. Un pavé « Savoir », incluant aussi son contraire « Ignorance », permettrait d’intégrer les multiples dimensions : connaissance des carrières possibles, des tendances, des besoins du marché, mais aussi connaissance de soi – besoins, capacités, aspirations, ambitions.
Le rôle des situations décisives
Nos décisions de parcours se prennent souvent dans des moments-clés, lorsque nous rencontrons une situation appelant une décision. Ces « situations décisives » jalonnent nos vies : accepter ou refuser un poste, démissionner, se reconvertir, créer son activité, etc. Et une opportunité ne devient réelle que si nous disposons de la connaissance nécessaire pour la reconnaître comme telle.
Une représentation à trois pavés
Ainsi, selon moi, une représentation simple pourrait articuler trois pavés :
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Connaissance
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Situations décisives
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Décisions de carrière
De leur interaction naissent nos trajectoires professionnelles, construites pas à pas.
Une invitation à l’action
Réfléchir à son parcours professionnel, c’est prendre conscience du rôle fondamental du savoir et des situations décisives. Plus nous nourrissons notre connaissance (du marché et de nous-mêmes), mieux nous saisissons les opportunités.
Et vous, quels savoirs ou quelles situations décisives ont marqué vos choix de carrière ? Partageons nos expériences pour enrichir cette réflexion collective.

Vers une économie de l’alliance. Philippe Lukacs.

Quelle belle initiative d’avoir invité Philippe Lukacs en première partie de l’Assemblée Générale des Dirigeants Responsables Océan La Vendée, dans les magnifiques locaux de l’École du Design Nantes Atlantique.
Une invitation parfaitement alignée avec cet engagement de responsabilité, qui fait directement écho aux propos de Philippe Lukacs : « Il est de notre responsabilité individuelle et collective de travailler à l’enrichissement de chacune de nos relations… En la prenant nous ne changerons pas, seuls, le monde. Mais nous aurons, à notre mesure, contribué à avancer vers un futur souhaitable et, de toute façon, nous aurons donné plus de sens et de poids d’humanité à notre vie. »
De l’échange à l’alliance : un pragmatisme inspirant
Cette phrase illustre parfaitement le pragmatisme de sa démarche et son appel à passer de l’échange à l’alliance.
Nul besoin d’un grand soir révolutionnaire. Philippe Lukacs nous invite simplement à faire de chaque échange l’occasion d’apporter un plus à la relation et de contribuer ainsi à l’émergence d’une nouvelle « Oikonomia » au-delà de la simple dimension économique pilotant notre civilisation.
Trois piliers pour transformer nos relations
Son approche repose sur trois fondements :
1. Reconnaître l’équivalence de valeur entre soi et l’autre.
2. Maintenir et valoriser les différences comme sources d’innovation et d’humanisation.
3. Et, finalement, chercher à créer ensemble un « commun » partagé, qui dépasse la simple réciprocité de l’échange.
Échapper à la « civilisation du cimetière »
Cette démarche nous offre une voie pour échapper à cette « civilisation du cimetière » évoquée par l’ethnologue Robert Jaulin. Les deals Trumpiens sont la pointe extrême de la logique transactionnelle qui domine actuellement. Le chaos civilisationnel que celui-ci provoque déjà, le désastre annoncé, est la démonstration, si nécessaire, de l’urgence, pour chacun de nous, d’agir avec encore plus de clairvoyance et d’énergie pour, a contrario, favoriser cette logique d’alliance.
Un appel à la responsabilité
Grand merci à David le Glanaër pour cette initiative et pour avoir, par son interview, permis à Philippe Lukacs de nous inviter ainsi à « être, plus pleinement et de façon aussi pertinente que possible, responsable ».
Pour ceux qui veulent aller plus loin dans la découverte de ce chemin vers plus d’Alliance, je recommande vivement la lecture du livre de Philippe Lukacs » Vers une économie de l’Alliance. Pour déjouer les dérèglements du monde « . Mon compte-rendu détaillé est disponible [ici]. Il devrait vous donner l’envie de courir chez votre libraire ! 😉
Stop Be Selfish !!!

J’emprunte ce titre ainsi que la formulation que les illustration de cet article à Alex M.H. Smith. Et ce d’autant plus que cet article a vocation à promouvoir une de ces vidéo dédié aux 3 stades de développement que connait peu ou prou tout entrepreneur.
J’ai, en effet, grand plaisir à partager par cet quelques lignes, l’intérêt que j’ai à entendre ces propos de Alex M H Smith dans cette courte vidéo : Stop Be Selfish ».
Il nous invite à visiter les trois étapes par lesquelles, peu ou prou, tout entrepreneur passe à un moment de son développement. Il nous invite ainsi à envisager l’étape 3 qui ouvre la voie à une véritable création porteuse d’innovation et de développement comme il le décrit par ces extraits de son intervention que je reproduis ici :
« Stage 3 :
There is another higher stage of founder consciousness still yet to explore. One that few ever think about, let alone. Serving the industry.
Here your focus is not on serving the customer. That is serving jthe wider industry that you were part of. And growing the pie, not stealing from your competitors.
You are looking to survey the entire industry terrain. focused on innovating in your industry. And you ask what appears out there ? What are the dynamics ? What are the flaws in this industry ? Where are the gaps ? How you can innovate on what is already there by changing the standard model, viewing the terrain from an helicopter view. »
Et pour finir ce salutaire rappel que je partage totalement :
« Every decision you make is silently driven by your underlying assumptions, your underlying view of the world, If you want to have better decisions, you need to update these assumptions. You need to update that software you have in your head. »
Un grand merci Alex M H Smith

De la quête de sens à la géolocalisation de l’existence et au téléguidage de nos envies

Guillaume Rosquin dans son article « Vivons nous dans un sociomythe ? » nous retrace le cheminement de ce sens qui en chemin s’est perdu.
Une courte synthèse …
Au XVIIᵉ siècle, l’Europe vivait sous le signe de la téléologie : chaque vie était un récit tendu vers un destin, une finalité supérieure. Puis vint le XIXᵉ siècle, avec son cortège d’usines et de sociologues, qui réduisit l’individu à un rouage dans une machine sociale. Le XXᵉ siècle acheva de dissoudre le mythe du libre arbitre : l’identité ne se définissait plus par ce que l’on poursuivait, mais par où l’on se trouvait et la fonction occupée – « ici j’habite, là je travaille ».
Aujourd’hui, le XXIᵉ siècle radicalise cette logique. Les technologies de surveillance et les algorithmes ont transformé nos vies en données cartographiables, nos désirs en pulsions marchandes. Nous oscillons entre deux rôles : producteur le jour, consommateur le soir. Même l’artiste, dernier symbole de liberté, doit plier son génie aux lois du marché. L’homme libre est devenu un homme rentable.
Et si cette analyse nous révélait une vérité dérangeante ? Nous croyions vivre dans des sociétés rationnelles, mais ne sommes-nous pas prisonniers d’un sociomythe – une fiction collective où la liberté n’est qu’une illusion bien huilée ?
… qui nous invite à un double mouvement dans une double interrogation :
– Dénaturaliser l’évidence : Pourquoi acceptons-nous que notre valeur se mesure en likes, en productivité, en données ?
– Réinventer des marges : Si le marché a colonisé jusqu’à nos désirs, où trouver des espaces de résistance ?
L’incongruité d’un tel texte sur Linkedin ?
Ce texte a trouvé sa place, notamment, sur LinkedIn et l’on pourrait s’en étonner ou s’en réjouir. Linkedin est souvent le temple de l’optimisation professionnelle, où l’on célèbre la performance, la visibilité, la « marque personnelle ». Publier une telle réflexion ici, c’est :
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Briser le consensus : Rappeler que derrière les KPI et les algorithmes, il y a des questions existentielles – et que le travail n’est pas une fin en soi.
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Provoquer un débat nécessaire : Dans un réseau où chacun se vend comme une « success story », interroger la marchandisation de l’humain (y compris des artistes) est un acte de salut public.
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Montrer que la pensée critique a sa place : LinkedIn n’est pas qu’un CV géant. C’est aussi un lieu pour repenser le monde du travail, ses dérives, et ses alternatives.
Le partage de ce texte pour un débat salutaire
Un immense merci à Guillaume Rosquin pour cette analyse lucide et courageuse, qui ose lier philosophie, histoire et critique sociale avec une belle élégance. Un merci aussi à Olivier Frérot, qui donne une tribune à des textes exigeants, loin des pensums médiatiques.
Ce genre de réflexion est précieux. En partageant ce texte, vous offrez à votre réseau une pause réflexive – un moment pour se demander :
« Et si la vraie réussite n’était pas d’être visible, mais d’échapper à l’invisibilité des systèmes ? »
#Téléologie #FuturDuTravail #QuêteDeSens #Résistance #Sociomythe

Stop à l’indigestion stratégique : quand les entreprises gavées rejettent le changement

Une des causes du rejet stratégique
Avec raison, @Elisbeth Gaillarde, en commentaire de l’article « La stratégie se cuisine et se sert avec soin », insiste sur cette autre cause possible du rejet fréquent d’une stratégie : « la capacité d’absorption des estomacs ». Un grand merci à elle d’avoir ainsi l’occasion de pousser avec vous cette réflexion un peu plus loin.
L’entreprise-organisme face au cycle naturel du changement
Il y va de la double capacité de tout organisme à ingérer et à digérer. L’entreprise est bien un organisme au sens organique du terme. Je n’oserai citer, par correction, le troisième et dernier temps tout aussi naturel à tout cycle de l’alimentation d’un organisme vivant.
Cela me donne toutefois l’idée d’y revenir un jour. Je souhaite pointer le naturel rejet à un moment donné de toute stratégie et de toute réorganisation. Même quand elle a été réussie, toute stratégie devient obsolète à un moment donné et doit être rejetée.
Les règles d’or de l’assimilation stratégique
Pour se limiter à l’ingestion et à la digestion de toute nouvelle stratégie, il y faut le temps nécessaire. Pour rester dans la métaphore empruntée, n’est-il pas de conseil plus sage que ceux de « ne mange pas trop vite ! », « n’avale pas sans mâcher » ? S’y ajoute la sage consigne de ne pas manger entre les repas !
Le conseil s’adresse aussi à celui qui est responsable de l’alimentation et en charge du menu. Le conseil salutaire se traduit alors par plusieurs impératifs. Il faut limiter le nombre des repas et veiller à leur régularité. Il ne faut pas forcer à manger. Il convient de laisser le temps de mâcher, le temps d’avaler et le temps de la digestion.
Le constat alarmant : l’indigestion stratégique généralisée
Force est de constater la haute fréquence de succession des nouvelles stratégies et de leurs changements. Les stratégies et plans d’actions se succèdent. Parfois ils se chevauchent, voire se contredisent. Les équipes doivent les ingurgiter jusqu’au trop-plein et en perdent l’appétit.
Ces équipes n’en peuvent plus. Naturellement, elles n’y croient plus. De là à déplorer leur non-engagement !!!
Les trois causes de la volatilité managériale destructrice
Les raisons de cette haute volatilité sont multiples. Elles résultent, entre autres, de trois phénomènes principaux.
D’abord, la valse des cadres dirigeants : 45% des recrutements de cadres dirigeants européens échoueraient dans les 18 mois.
Ensuite, la valse des modes managériales. Ces modes incitent les dirigeants confrontés aux difficultés à suivre la tendance quasiment au rythme de la mode vestimentaire.
Enfin, le désarroi réel et bien compréhensible de nombre d’entre eux. Ils font face à l’incertitude, aux inconnues et à l’instabilité du contexte actuels.
Et si nous changions de régime ?
Face à cette épidémie d’indigestion stratégique, il est temps d’agir. La solution ne réside pas dans l’arrêt total des changements, mais dans l’adoption d’une hygiène managériale plus saine.
Commencez dès aujourd’hui par trois gestes simples :
Premièrement, faites le diagnostic nutritionnel de votre organisation. Combien de nouveaux projets stratégiques avez-vous lancés ces 12 derniers mois ? Vos équipes ont-elles eu le temps de les digérer ?
Deuxièmement, instaurez des temps de jeûne stratégique. Accordez à vos collaborateurs le temps d’assimiler pleinement les changements en cours avant d’en introduire de nouveaux.
Troisièmement, devenez un chef cuisinier de la stratégie. Préparez vos changements avec soin, servez-les au bon moment et laissez vos équipes savourer chaque transformation.
Vos collaborateurs retrouveront l’appétit du changement. Votre organisation reprendra des forces. Et vous, vous redécouvrirez le plaisir de diriger une équipe épanouie et performante.
L’action commence maintenant : quelle sera votre première mesure pour lutter contre l’indigestion stratégique dans votre organisation ?


La mascarade de l’entretien d’évaluation annuelle

L’étymologie révélatrice de l’évaluation
Cette réflexion de Sebastien Martin sur les méfaits de l’évaluation annuelle me fait penser à l’étymologie même du verbe évaluer. Ce mot vient du latin valere, qui signifiait « être fort, valeureux, avoir de la valeur » et plus profondément « avoir puissance et autorité ».
Un rapport de force implicite
Derrière ce mot se cache l’ambiguïté d’un processus qui implique domination et pouvoir. Évaluer quelqu’un, c’est s’arroger le droit de mesurer sa valeur. Mais qui peut réellement prétendre disposer de cette autorité ?
L’illusion d’objectivité
L’évaluation annuelle présuppose qu’un individu puisse réduire la complexité d’un autre être humain à quelques critères figés. Ce faisant, elle entretient l’illusion d’une objectivité rationnelle, alors qu’elle reconduit en réalité des biais et des rapports de pouvoir.
La mascarade de l’évaluation annuelle
Au-delà de ses biais, l’entretien annuel prend souvent la forme d’une véritable mascarade. Chacun y arbore un masque : le manager celui de l’objectivité supposée, le collaborateur celui de la conformité attendue. Ces postures entravent un échange authentique fait d’écoute, de transparence et de compréhension réciproque. Derrière cette mise en scène, la relation perd en sincérité et en profondeur.
Évaluer ou accompagner ?
Plutôt que de se demander « comment bien évaluer ? », il serait plus juste de se demander « avons-nous la capacité d’évaluer ? ». La finalité de l’évaluation reste une sanction de performance, non un accompagnement dans la progression.
Différencier évaluation et feedback
Évaluation et feedback ne servent pas la même finalité. La première s’inscrit dans un cadre hiérarchique et normatif. Le second repose sur un échange continu, ouvert, et véritable entre partenaires. Si l’évaluation est indispensable pour juger de l’atteinte d’objectifs clairement et objectivement mesurables, le feedback régulier est le seul levier pour soutenir la croissance, la créativité et l’engagement. J’ai d’ailleurs consacré au feedback un article spécifique : « Un feedback nourricier, viatique du développement de l’entreprise ».
Pour passer à l’action
Si nous voulons faire évoluer nos organisations, cessons de confondre évaluation et accompagnement. Osons instaurer une culture du feedback, plus humaine et plus juste. Remplaçons la mascarade de l’entretien annuel par de véritables conversations de progression.
Alors, la prochaine fois que vous pensez « évaluer », posez-vous la question : ne serait-il pas plus fécond de dialoguer ?



