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16/11/2021 – Du client roi sans couronne au client citoyen et responsable.

« Il n’y a pas de démocratie dans l’entreprise. Le client est roi. »

Déclarer que le client est roi selon la formule consacrée du « Client Roi » me met étrangement mal à l’aise. Et pourtant, j’en défends inlassablement l’idée en répétant et répétant, ce qui devrait être une évidence, que l’entreprise n’existe que par et pour ses clients.

Et, en même temps, cette notion de « client roi », ne cesse de convoquer en moi des « Ah ! ça ira, ça ira, ça ira, les … » et des images de « nuit du 4 août » que la glorification du client roi déclenche dans mon esprit profondément républicain.

A y réfléchir, je décèle, derrière cette gêne toute une longue, complexe et ambigüe évolution de la notion de client et du rôle et de la place de ce dernier dans la société et dans l’entreprise.

Pourtant, à bien y regarder, et, au-delà des nombreuses sinuosités empruntées ces dernières décennies par le discours sur le client, deux notions simples, « la relation client – fournisseur » et  « l’esprit de service », permettent de lever clairement cette ambiguïté.

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Ayant partagé cette intervention de Philippe de Villers sur Linkedin, j’ai reçu immédiatement une pique bien sentie, pertinente et humoristique de Guillaume Chabra. Il y affirmait ne pas demander à ses clients de se comporter en roi, ni à ses collaborateurs de se comporter en serviteurs et dénonçait dans cette vidéo un discours moyenâgeux. Ce que je partage bien évidemment comme je l’ai répondu immédiatement. Toutefois, à la réflexion, je ne peux me contenter de cette réponse.

Ne jetons pas l’esprit de service et le service client … avec la tête du roi !

En effet, affirmer que le client est roi ne revient pas à dire que le client peut et doit se comporter en despote. Même les rois ont des obligations et, en général, à ne pas les respecter ils finissent mal. « Ah ! ça ira, ça ira, ça ira … ». Aussi je ne peux qu’être d’accord avec Guillaume Chabra.

Par contre, mettre en correspondance la notion du client roi et la servitude des collaborateurs me gêne beaucoup. C’est nier la notion essentielle de l’esprit de service qui se doit d’être l’essence de l’entreprise dans sa relation avec son marché.

Nous en revenons à ce qui devrait être une évidence, une brève de comptoir universellement partagée dans les cafétérias de toutes les écoles de commerce et universités de gestion : « le client est la seule raison d’être de l’entreprise. Comme telle, elle en est sa condition d’existence ». Il est bon de se le rappeler en permanence et de donner ainsi toute sa force à cette notion de client, notion qui est dans un rapport quasi tautologique avec celle d’entreprise.

Le client roi, un roi sans couronne

Il n’est pas sans intérêt de rappeler le contexte de la naissance de ce slogan « Le Client Roi !». Je fais appel pour cela à mes souvenirs de gamin et de la fin des années 60. Je me souviens, enfant, m’être étonné de ce slogan nouveau qui subitement avait « trôné » placardé sur toutes les devantures de magasin. Je me rappelle ma surprise face à ce « Oyez, Oyez, bonnes gens, désormais le Client est Roi, vive le Roi ! ».

Quel était donc le roi précédent qui, désormais mort, offrait son trône vide au nouveau roi proclamé : le client ?

Cette proclamation marquait très exactement les prémices de la fin d’un monde. Je dis bien les prémices car l’on ne bascule jamais brusquement d’un monde dans un autre. Dans le cas du « Client Roi » cette proclamation marque l’entrée dans un sas de passage : le passage progressif d’un marché de l’offre à un marché de la demande. Un sas qui conduira  subrepticement à la libéralisation des années 80 puis à l’individualisation que la numérisation des échanges et des services porte aujourd’hui à l’extrême.

 Le client roi, … un roi sous tutelle

Ce client roi, ainsi proclamé, a été, de fait, et demeure encore aujourd’hui un roi en régence. Un roi régenté par le marketing et les médias qui lui ont dit quels étaient ou plutôt devaient être ses besoins et qui l’en ont persuadé pour encore et toujours plus pouvoir lui vendre les produits que le régent Marketing à mission d’écouler.

En fait l’on est passé d’un marché de l’offre celui du « Producteur Roi »), à un marché non encore de la demande du client mais à celui de la demande dictée par le marketing et la publicité. Un client roi sous la tutelle du marketing et au final, un roi sans couronne. Nous vivons toujours aujourd’hui sous cette régence.

Aujourd’hui encore, le fait que le client est au principe de l’entreprise n’est pas acquis et de loin

Malgré toutes les incantations de « placer le client au centre » qui ont suivi ce prétendu avènement, , nous ne sommes toujours pas sortis de cette régence et de cette tutelle.

Une récente émission de France Culture dédiée au management a réussi l’exploit de ne pas une seule fois citer le mot de client, ni même évoqué la notion, au cours d’une heure d’émission.  Cette interview de Ghislain Deslandes, (par ailleurs très intéressante, riche en idées et en références et que l’on écoutera avec grand intérêt), n’en évoque même pas l’idée. L’on m’a dit, mais je n’ai pu le vérifier, qu’il en était de même de l’ensemble des volets de la série consacrée au thème. Comment peut-on s’intéresser au management sans avoir à aucun moment à l’esprit que le management est fondamentalement l’art de faire en sorte que l’entreprise délivre à ses clients la promesse qu’elle leur a faite ?

L’entreprise comme vase clôt, jardin de l’entre soi

L’entreprise est, encore trop souvent, pensée et vécue comme un vase clôt ego-centré et dont la principale dynamique est recherchée dans l’efficacité de ses processus de production et de communication commerciale et dans un marchandage entre ses acteurs internes (actionnaires, managers, collaborateurs).

Un jardin où l’on en vient à oublier le client qui est hors les murs

Un jardin dans lequel, par exemple, il est impossible pour le client, lorsqu’il rencontre un problème, de joindre un interlocuteur et d’obtenir une réponse à une question non répertoriée dans un formulaire de réponse automatique.

Un jardin dans lequel, par exemple, les applications informatiques et les sites web n’ont pas été testés en permanence d’un point de vue client et où le parcours du client tient du parcours du combattant.

Le discours entendu entre les murs de ces organisations porte principalement sur la dimension « hard » (les structures et les processus). La dimension humaine (le soft) se limite souvent alors aux relations hiérarchiques, managériales et syndicales et sont en priorité et majoritairement consacrée aux acteurs internes de l’entreprise.

Nul étonnement alors à voir fleurir l’actuelle et abondante littérature dédiée au « bonheur au travail ». Une littérature qui fait jouer à l’entreprise un rôle qui n’est pas le sien. Ne nous trompons pas sur cette affirmation. Le bonheur est une affaire individuelle qui n’a pas, ne peut et ne doit pas être abandonnée par le collaborateur aux bons soins de son entreprise. Ceci ne veut, évidemment, pas dire que l’entreprise ne doit pas prendre soin de ses collaborateurs. Elle se doit, bien évidemment de travailler, ne serait-ce que dans son propre intérêt bien compris, à leur plein épanouissement dans le respect pour chaque collaborateur de sa personne, de sa sécurité, de sa santé et de son équilibre.

« Le client au centre » ou « la maîtresse au milieu ! »

A l’opposé, et en partie par réaction, est apparue une approche a priori intéressante qui s’intéresse au client avec cette fois le slogan : « Le client au centre. » Là encore, tant l’invocation pourtant vertueuse a été galvaudée, je ne peux m’empêcher d’avoir, immédiatement, à l’esprit une autre rengaine : « Les cahiers au feu et la maitresse au milieu !».

En exigeant de translation du trône du client soit disant roi au centre du jardin clôt se veut un acte révolutionnaire. D’une certaine manière, « le client au centre ! » c’est la prise de la Bastille.

La « totémisation » du client, au risque pour l’entreprise d’y perdre son âme et sa raison d’être

Au-delà des usages purement marketing de la formule « le client au centre », qui en ont été faits souvent, cette glorification, cette « totémisation » du client n’a en fait pas placé le client à sa juste place, là où il doit l’être : non au centre mais au principe et à l’horizon de l’entreprise. Non, le client n’est pas le CEO de l’entreprise selon la formule entendue souvent dans la cour de cette école. Le client est la finalité de l’entreprise. Il n’en n’est pas le dirigeant.

Placer le client au centre de l’entreprise c’est lui donner le pouvoir qu’il n’a et ne doit pas avoir

Transporter le trône de ce client (soit disant) roi au milieu du jardin ne lui rend pas sa couronne pour autant. Tant que le marketing et la publicité « algoritmisent » ses comportements et sa consommation il ne s’émancipera pas de leur tutelle.

L’entreprise est un acteur dont la mission est double. Elle a non seulement pour mission de répondre aux besoins des clients mais également d’innover et de proposer des solutions nouvelles créatrices de valeur. Elle est dans un perpétuel échange dialectique entre une demande et une offre qui, toutes les deux, sont en perpétuelle évolution.

Ne se ranger qu’aux injonctions d’un Client Roi « totémisé » au centre de l’entreprise, conduirait inéluctablement l’entreprise à sa décadence. Cette « totémisation » du client roi en le plaçant au centre de l’entreprise reviendrait pour l’entreprise à s’inféoder à lui et à ses seuls désirs.

La vague des démarches de qualité totale ont préparé la translation du client de son prétendu trône de roi à sa prétendue place au centre de l’entreprise

Cette injonction de placer le client au centre est l’onde portée dans les années 90 de la vague de la qualité portée par l’industrie japonaise dans les années 80-90.

Nous étions alors sous le feu de la qualité totale à la japonaise qui a permis aux produits japonais (automobiles et électroniques) d’envahir les marchés à partir de la fin des années 70.

Ces démarches qualité ont centré l’attention sur les processus internes de l’entreprise et sur leur impact sur la qualité du produit tout en en commençant à sonder et interpréter les rêves des clients comme nous le rappelle le slogan de Sony de l’époque : « Vous en avez rêvé ! Sony l’a fait ! ». Le client n’a alors toujours pas la parole. Nous sommes alors en pleine psychanalyse : l’industrie interprète ses rêves !

Avec le recul, l’on peut y voir un appel à l’amélioration de la culture du jardin clôt et non encore l’avènement d’un client roi dégagé de sa régence. On y entend plus un appel lancé du fond de ce jardin. Un appel qui s’intéresse encore majoritairement aux fruits de ses plantations et à l’amélioration de leur culture. Une entreprise, qui, une fois les fruits récoltés et lustrés, ouvrira, enfin, ses portes pour les vendre au marché après un tir d’artillerie publicitaire pour préparer le terrain.

Le client n’est pas au centre. Il est au principe de l’entreprise et en est l’horizon… … un horizon qui, sans cesse, change au fur et à mesure que l’entreprise évolue et se développe

Avec grand profit, l’entreprise associera le client dans des démarches qualité ou de créativité. Il n’en demeurera pas moins extérieur au projet de l’entreprise dont il n’est pas acteur. Il est clairement une des parties prenantes de l’éco système de l’entreprise et de son projet. L’on se souciera avec profit de son parcours client et de son expérience client qu’on concevra et pilotera avec  le plus grand soin. On écoutera toujours avec le plus grand soin ses remarques, idées, suggestions et réclamations. On l’en remerciera, à chaque fois, avec la plus grande sincérité du cadeau qu’il nous offre ainsi par son feedback. Un feedback client où l’entreprise trouvera toujours en germe de bénéfiques pistes d’évolution.

Cette écoute est même au principe du projet de l’entreprise. Les démarches de design thinking ou de lean management et de lean start-up sont là pour opportunément venir outiller cette écoute et cette découverte des besoins des clients et des façons de les satisfaire.

Ces démarches sont riches et nécessaires. Elles ne traitent toutefois qu’une partie (essentielle et préalable) de la configuration de l’organisation. En effet, l’organisation doit, au delà du seul client prendre en compte et intégrer l’ensemble des composantes du système et de l’écosystème de l’entreprise. (cf. l’écologie de l’éco système de votre entreprise)

Une entreprise est avant tout une vision, celle d’un monde que l’entrepreneur s’emploie par son entreprise à faire advenir

Une entreprise c’est, avant tout, une vision d’un monde quel qu’il soit, que l’entrepreneur imagine et qu’il se donne pour mission de contribuer à construire par son action.

Nul messianisme là-dedans. Avoir une vision n’est pas l’apanage des grands visionnaires avec un « V » majuscule. En fait, toute action entreprise l’est en fonction d’une vision, celle du résultat que l’on attend et souhaite de l’action que l’on entreprend.

Pour un entrepreneur, comme pour chacun de nous, avoir une vision, c’est visualiser, tout simplement et tout humblement, le produit de l’action que l’on envisage de mener. C’est l’imaginer avec la ferme conviction que le produit de cette action répondra à un besoin précis d’un groupe de personnes à qui l’on destine son offre et la solution qu’elle porte. Ce besoin, lorsqu’il existe réellement et qu’il est confirmé, est toujours le besoin de voir comblé un manque, ou de voir soignée une souffrance par le soin comme s’y réfère le « care » anglo-saxon.

Dès lors, NON le Client n’est pas un Roi despote, NON l’entreprise n’est pas un jardin clôt et, nous y venons, NON les collaborateurs ne sont pas des serviteurs au sens ancillaire du terme.

La relation client – fournisseur : Mort au client roi ! Et vive le service client !

La relation client – fournisseur est portée par l’esprit de service et non de servitude.

L’entreprise nait, survit et se développe, ou meurt, par l’interaction permanente entre une proposition et une demande, entre une promesse de l’entreprise et la confiance donnée par le client à une entreprise qui la mérite. Philippe de Villiers le dit, à sa façon dans son intervention : « Etre entrepreneur c’est aimer ses équipes, et aimer son produit. Il faut respecter le client. Il aime notre produit. C’est un honneur qu’il nous fait. Alors montrons-nous dignes de cet honneur. C’est ça l’entrepreneur. ».

Ma façon de dire la même chose, est qu’une entreprise est la promesse qu’elle fait au marché. Une promesse qu’elle s’engage à respecter et qu’elle saura respecter en mettant tout en œuvre pour y parvenir.

Et c’est là, pour moi, la définition de la marque d’une entreprise véritable. J’y vois la définition de l’entrepreneur : celui qui invente la promesse qu’il fait à son marché et qui tient cette promesse. Sa réussite tient à sa capacité à identifier voire révéler le besoin des clients qu’il s’est donné pour mission de servir parce qu’il en possède les capacités ou fait tout pour les acquérir.

La relation client – fournisseur : L’entreprise au cœur de son écosystème

En définitive, même si cela paraitra à certains une banale évidence, le concept de « la Relation Client – Fournisseur » est au cœur de toute la réflexion. C’est elle qui permet, en toute simplicité et en toute efficacité, de retrouver l’équilibre entre ces deux extrêmes inconciliables du « Client Roi » et de « l’entre soi de l’entreprise jardin clôt ».

C’est là un concept tout simple. Il prêtera à sourire aux amateurs de théories compliquées. Il donnera à sourire à ceux qui sont dans une quête toujours à renouveler des derniers nouveaux modes de gestion et de management. J’y trouve pour ma part la quiétude d’un concept simple et d’une richesse infinie pour qui veut prendre la peine de réfléchir à chacun de ses deux termes et à la richesse de leur interaction.

Le trait d’union qui relie ces deux mots, « Client » et « Fournisseur », porte bien son nom et assure bien sa fonction.

Du client roi sans couronne au client citoyen responsable

La loi PACTE de 2019, en écho à une forte demande sociale, se donne, entre autres, pour but de repenser la place des entreprises dans la société. Elle enjoint les entreprises volontaires à définir leur raison d’être dans le cadre d’une Responsabilité Sociale et Environnementale.

Par la RSE, la société appelle les entreprises à devenir citoyennes et responsables. Elles ne le pourront que lorsque le client lui-même, c’est à dire chacun de nous, sera citoyen de plein et complet exercice en respectant lui-même les injonctions qu’il adresse aux entreprises. Cela d’autant plus qu’il est bien souvent dans la position concomitante de client et de salarié ou de prestataire. Si l’on se place au niveau global du système, cette société dont nous sommes tous membres, est un auto entrepreneur au sens absolu du terme : nous en sommes à la fois, les collaborateurs et les consommateurs et les législateurs.

Ce client ne sera ce citoyen responsable qu’en vivant, en se comportant et en consommant en accord avec les injonctions qu’il fait à l’entreprise. Il ne le sera que lorsqu’il accordera ses déclarations de citoyens avec ses comportements de décideur, de consommation et d’achat.

En effet, l’on ne peut exiger des droits comme salariés ou indépendants sans les reconnaître et les appliquer à l’ensemble des autres membres de notre société, et au-delà.

En conclusion

Ainsi, loin d’un Client Roi, qu’il serait anachronique de continuer à proclamer, rêvons d’un « Client Citoyen et Responsable ». Sachant que le client et sa demande sont au principe de toute entreprise, seul un client véritablement citoyen et responsable, en accord avec les valeurs humaines et sociales de la société, permettra aux entreprises d’être, comme beaucoup le demande, citoyennes et responsables.

 

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L’entreprise : fleur ou iceberg ?

La réalité de l'organisation est complexe. Interdit elle à l'entrepreneur de décider et d'agir ?

L’iceberg de l’organisation

Il est tout à fait vrai que seule une faible partie de la réalité d’une organisation est directement observable. Thibaut Brière, en citant Evert Gummesson (1991) et la métaphore de l’iceberg, nous rappelle que seuls 10 à 15 % de l’organisation est visible,

Un constat qui place chacun des entrepreneurs, chacun des dirigeants et donc des décideurs, en haut de l’iceberg et devant une difficulté « titanesque », celle de savoir comment appréhender et tenir compte des 85 à 90 % immergés et non visibles.

Les observateurs (plus ou moins bien intentionnés) sont nombreux à décrier l’aveuglement de certains des dirigeants voire l’incompétence de beaucoup qui leur font préférer des solutions immédiates appliquées sur des problèmes dont la complexité est ignorée ou niée.

Une position périlleuse …

A leur décharge, reconnaissons qu’entrepreneurs et dirigeants, tout en haut de l’iceberg sont dans une position bien périlleuse.

Oui, le décideur n’a pas le luxe de prendre le temps de tout appréhender, de tout analyser et de tout prendre en compte de la réalité de son organisation.

Pressés par l’urgence et la multiplicité des décisions à prendre en jet continu. C’est un luxe qu’ils ne peuvent se permettre.

… Mais non surprenante

Reconnaissons, de plus, que la prise en compte de la complexité et la multiplicité des approches d’une situation développées par « les humanités » ne sont pas ce qui a été au cœur de la formation de la majorité des dirigeants et des décideurs d’aujourd’hui. Reconnaissons, pour le regretter, la non préparation de beaucoup à une approche systémique de la réalité. Il n’est que de rappeler la succession des fonctions dominantes dans l’entreprise qui ont jalonnées décennies après décennies la vie de l’entreprise, avec la prédominance de certaines  fonctions à certains moments de l’histoire (la production, le commerce, le marketing, la finance, les ressources humaines, les nouvelles technologies, …)

La démarche RSE (Responsabilité Sociétale de l’Entreprise ) est une notion récente. Elle montre bien que cette prise en compte de la globalité et de la complexité n’est pas naturelle. Il a fallu une loi, la loi PACT, pour sensibiliser les entreprises à la prise en compte de l’ensemble des dimensions de leur écosystème.

Il est facile pour un observateur extérieur et non impliqué de pointer ce manque de « réalisme » (cette non prise en compte de la totalité de la réalité) de nombre de dirigeants. Il lui est facile de dénoncer ces vues étroites de nombre de dirigeants et de prôner la prise en compte d’approches longitudinales, transversales, externes et internes pour appréhender la réalité de l’organisation.

Tout cela est vrai mais est-ce réaliste ? Comment l’entrepreneur que vous êtes, quand bien même en seriez-vous conscients et en volonté de le faire, peut-il y parvenir ?

Alors que conseiller à ces entrepreneurs ?

  1. Ne rien décider tant que l’ensemble de la réalité de l’organisation n’aura pas été investiguée et comprise par la multiplication et la convergence d’études transversales, longitudinales, internes et externes ?Les années d’études qui y sont nécessaires ne sont guère compatibles avec le temps de l’action et de son urgence.
  2. Les engager à avoir le courage de prendre de mauvaises décisions, comme nous y invite Véronique Nguyen ?

Son invite est intéressante. Je n’en partage toutefois pas complètement l‘analyse de ce qui est présenté comme la « mauvaise décision ».  Pour moi et contrairement à cette présentation, prendre une mauvaise décision n’est pas prendre une décision qui ne serait par rationnelle. Selon moi, opposer « mauvaise décision » et « décision rationnelle » ne tient pas. Opposer  » décision rationnelle  » et « décision risquée » ne vaut pas.
Le courage n’est pas de prendre une mauvaise décision mais tout simplement de prendre une décision. Le courage est de décider et autant « bien » décider en étant, notamment conscient des biais cognitifs dont nous sommes tous victimes.

Au final le décideur décide seul mais il est possible pour un responsable d’organiser sa décision et de la raisonner en l’appuyant sur le sens donné à l’action et sur un certain nombre de règles et de fonctionnement. Toute entreprise gagne à définir précisément son système de décision, à l’activer et à le maintenir avec le plus grand soin.

L’équilibre entre l’approche solution et l’approche problème

Il est de bon ton de décrier le manque de profondeur des décideurs qui succomberaient à la soif de solutions toutes faites sans s’assurer de la réalité du problème. Il est alors pertinent de mettre en garde contre le probable risque de voir cette solution ne rien solutionner du tout.

Dénoncer une telle inclinaison du dirigeant revient à privilégier comme antidote, une approche problème. Une approche qui s’intéresse prioritairement et majoritairement au problème, à son identification, à sa qualification et à sa compréhension. Rappelons nous Einstein qui affirmait : « Si j’ai une heure pour résoudre un problème, je passe 55 minutes à étudier le problème et les 5 dernières minutes à proposer une solution ».

Comme l’affirme Michel Crozier « le problème est le problème ».

Toute la question est de faire en sorte que l’identification et la qualification du problème puisse se faire à la fois de manière pertinente et avec la meilleure économie de moyen. Et cela n’est ni fréquent ni simple à obtenir.

Alors et si l’on évitait le maximum de problèmes en définissant le sens de l’action de l’entreprise en donnant du sens le plus en amont possible et en le partageant dans l’entreprise ?

Si cela ne vaut pas assurance d’éviter tout problème, du moins est-ce le moyen d’en éviter un bon nombre et de solutionner plus aisément ceux que l’on n’aura pas pu éviter en donnant des repères pour décider des solutions.

La prise en compte de notions de base et donc essentielles

Envisager son entreprise comme un système au sein de son écosystème en étant tout à fait clair sur la raison d’être de son entreprise. Les notions de Vision, de mission, de contribution, domaine, parties prenantes, et au final de Marque avec sa promesse et l’engagement que l’entreprise prend vis-à-vis de son marché de tenir cette promesse résume le tout de la décision.

Avec la prise en compte de la notion à la base de la sociologie des organisations qui est « l’intelligence des acteurs » cette intelligence de comprendre les « bonnes raisons «  qu’à chacun  des acteurs d’agir et de réagir comme il le fait. Aussi l’intelligence des acteurs est-elle à la fois 1) l’intelligence de chacun des acteurs qui agit sur la base de ses bonnes raisons et aussi 2) l’intelligence de l’observateur qui comprend (prend avec), en les identifiant les raisons qu’ont les acteurs d’agir comme ils le font.

La bienveillance : le bien voir et le bien donner à voir

Aucune décision « sensée » ne peut exister en l’absence de la prise en compte consciente et claire de ces quelques notions de base et donc essentielles. Ces notions sont simples et exigeantes. Elles obligent l’entrepreneur comme tout décideur à devoir répondre clairement à ces quelques questions. Ses décisions, prises en fonction de ces repères « directionnel » seront alors « raisonnables ». Notons que le terme de Direction (La Direction) fortement chargé de sa dimension hiérarchique a perdu aux yeux de beaucoup ce sens d’orientation et de « sens ».

La notion de vision est essentielle au sens donné à l’entreprise par son créateur et son dirigeant. Le lien est naturel entre la clarté de la vision et la notion de bienveillance qui loin de toute notion morale et non opératoire est l’art de « bien veiller et de bien donné à voir ». Je développe cette notion dans mon article : la bienveillance ou l’art du bien veiller et du bien donner à voir.

En partageant ces réponses au sein de son organisation et avec ses parties prenantes, il permettra à l’ensemble des acteurs du système qu’est l’entreprise et de son écosystème d’agir avec sens et dans une autonomie accrue en permettant ainsi une adéquation renforcée entre les actions initiées au plus prêt de leur terrain et les circonstances et besoins de ce terrain.

Des glaces de l’iceberg aux promesses de la (perma)culture

Alors oui, seuls 1à à 15 % de la réalité d’une entreprise sont visibles. Pour filer la belle métaphore illustrée par les planches montrant une fleur avec, sous la terre, une vue de son réseau de rhizomes, faut-il, passer un temps infini, temps dont l’entrepreneur ne dispose pas, pour faire des années d’études de botaniste ?

Ne vaut-il pas mieux avoir conscience de ces quelques règles simples et travailler le sol et ses profondeurs pour nourrir ces racines que sont la communauté des acteurs de l’entreprise et de son éco-système, en l’enrichissant de ses réponses.

Toute plante pousse en fonction du soleil et de la lumière qui lui sont données et accessibles. Il n’est que de voir, en forêt, les arbres allonger leurs branches pour aller chercher la lumière là où le ciel est accessible au travers des branches des autres arbres.

En conclusion

Se rendre compte que plutôt que d’être tout en haut de la pyramide, en tant que dirigeant l’on est assis tout en haut d’un iceberg a de quoi refroidir. Positivement convenons que cela est « rafraichissant » et calme des tendances à croire en sa toute puissance.

Au final il me plait de préférer pour l’entreprise l’image de la fleur à celle de l’iceberg. L’image d’un edelweiss qui lie et l’iceberg (qui est bien là) et la fleur (qui se nourrit de ses racines) me parait une bonne illustration de ce mariage.

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De l’incarnation des valeurs ou le soft au fondement du hard.

Nous assistons à un fréquent décalage entre valeurs affichées et culture réelle de l’entreprise. Ce décalage remet-il en cause l’importance des valeurs au fondement de la culture de l’entreprise ? Remet-il en cause l’importance de cette culture pour la réussite de son projet et de sa raison d’être ? Explique-t-il le désintérêt fréquent des dirigeants pour cette dimension culturelle du projet de l’entreprise. Illustre-il le désintérêt fréquent pour cette composante que beaucoup considèrent comme soft, voire trop soft et donc comme sans intérêt ? Et si le soft était en fait le ferment du hard de l’entreprise et la garantie de son succès ?

Les valeurs sont au fondement de la culture de l’entreprise.

Quelles que soient les valeurs  affichées, seule la réalité de la culture vécue au quotidien (et souvent en contradiction avec les valeurs proclamées) importe et détermine les décisions et comportements des équipes. Cet écart met en évidence le déni de nombre de dirigeants de l’importance des valeurs et de leur respect. Bien souvent ces dirigeants privilégient l’action sur les structures et les procédures et tâches (le hard). Ils laissent la réflexion et l’action sur les valeurs aux philosophes d’entreprise. Philosophes et sociologues qu’ils se gardent bien de consulter car « trop soft » à leur goût. Or le hard n’est hard que s’il intègre et traduit le soft qui l’enfante. C’est la culture et son système de valeurs qui fait la force du hard et sa capacité délivrer la promesse de l’entreprise.

Des valeurs proclamées en décalage fréquent avec la réalité.

Un déni de l’importance de la culture dans la performance de l’organisation …

Comme le rappelle Christophe Genoud dans son article : « Le Monde d’après : constatons nos valeurs avant de les élire », un écart est trop souvent constaté entre les valeurs proclamées et les valeurs réellement incarnées par les acteurs de l’organisation. Avec raison il souligne que plutôt que d’en dévaloriser, de ce fait, les valeurs il importe d’en souligner l’importance.

Le déni et ses risques

En effet, combien d’entreprises peuvent-elles réellement affirmer que leur fonctionnement est bien la traduction des valeurs proclamées ?

Combien y attachent-elles l’importance que cette dimension culturelle mérite ?

Combien se réfugient-elles dans la consolidation de leurs structures et de leurs procédures (le hard) ? En le faisant, elle cherchent à se rassurer pour muscler leur fonctionnement en déniant à la culture toute vertu opérationnelle.

Combien d’entreprises deviennent-elles par ces décalages complètement schizophrènes ? Usant d’un double langage, elles n’accordent pas leurs actes avec leurs paroles.

L’organisation schizophrène facteur de burnout mais  également en risque d’y succomber.

Les dégâts sont humains, et cela est, de loin, le plus grave. Cet écart provoque  perte de sens et de confiance et pénalise l’engagement. Le risque de burnout pointe. Ces risques sont également économiques. Ils touchent à la crédibilité de l’entreprise et impacte sa performance notamment par le désengagement qu’il entraîne. Qui ferait confiance à une telle entreprise ? Quelle peut être la performance d’une entreprise dont le geste ne s’accorde pas à la parole ?

Cet écart est facteur du burnout des collaborateurs. Il arrive que cet écart devienne trop flagrant et qu’il persiste par son déni. C’est l’entreprise toute entière qui est en risque de burnout. Elle y joue sa santé et même son existence.

… Aux valeurs incarnées :

Les valeurs ne valent et ne servent que si l’on en use.

Regrettons cette non compréhension dont nombre de dirigeants font preuve. Regrettons leur déni du fait qu’aucune évolution, qu’aucune transformation de leur organisation ne se fera si elle n’est portée par les réelles valeurs incarnées de l’organisation.

La performance de l’organisation trouve sa source dans la culture de l’entreprise. De même, tout changement auquel est soumis inéluctablement toute organisation pour rester en vie et se développer ne peut se traduire par une réelle transformation qu’au prix d’un changement culturel.

« Quand j’entends le mot culture, …. »

Les valeurs et la culture de l’organisation relèvent pour beaucoup du soft et est rapidement et viscéralement évacué pour exprimer un besoin de transformer le hard. « Quand j’entends le mot « culture » … »

Le soft pour beaucoup ne fait pas le poids face au hard que beaucoup veulent transformer par décret comme le rappelle François Dupuy dans son dernier ouvrage « On ne change pas les entreprises par décret ».

Combien de consultants ont pour commande de ces dirigeants : Aidez-moi à transformer mon organisation ! ». Ce qui revient à dire « Transformez moi le hard ! » … « et plus vite que ça ! ». Leur empressement à transformer n’a d’équivalent que leur déni du fait que le hard ne pourra jamais être transformé s’il n’est pas porté par une évolution de la culture de l’organisation. C’est le soft qui fait la robustesse du hard. Un hard d’autant plus solide et porteur de la performance de l’entreprise qu’il est ou sera le résultat du système de valeurs de l’organisation. Ce hard sera d’autant plus solide que la culture « séminale » du fonctionnement et de l’organisation de l’entreprise est incarnée et vivante.

Le travail sur la culture.
Une culture … ça se cultive

Or combien d’entreprises entreprennent réellement cet effort de définir les valeurs porteuses de leur projet ? Il est pourtant essentiel à la réussite de leur entreprise. Ces valeurs sont  au principe de sa réussite. Elles en sont, au sens littéral du terme, proprement le principe.

Ce travail est un travail d’allers-retours entre les valeurs qui animent leur(s) créateur(s) et dirigeant(s) et les besoins et attentes des parties prenantes de l’éco système de l’entreprise.

Identifier les valeurs de ses clients et partenaires cibles est essentiel. Comme l’est leur prise en compte en regard des valeurs des créateurs et de l’entreprise.  L’efficience du système de valeurs de l’entreprise résultera de cette « négociation ». Elle amènera l’entreprise à sélectionner dans ses valeurs celles qui font écho à celles attendues par ces parties prenantes. Il n’est pas question ici de se renier et d’afficher des valeurs attendues des parties prenantes et que l’entreprise n’incarnerait pas et encore moins qu’elle ne partagerait pas.

Il est important que le système de valeurs ne soit pas posé comme l’affirmation du crédo d’un créateur ou d’un dirigeant. Sa seule légitimité est dans sa démontrée adéquation au projet et à la raison d’être de l’entreprise. Il n’est pas ici question pour le dirigeant d’imposer son propre modèle de valeurs et de viser la soumission des équipes à ses valeurs. Son système de valeurs ne résulte que de son seul choix et ne concerne que lui. Il n’a aucune légitimité à l’imposer à quiconque. Il est ici, et c’est fondamental, question de la démonstration de l’adéquation des valeurs choisies au projet de l’entreprise. Des valeurs utiles et non des valeurs morales, sans exclure que ces deux notions coexistent.

Des valeurs choisies dans la famille des valeurs portées par la société.

Ces valeurs dépendent, entre autres, de l’évolution de la société et de celles des collaborateurs en tant qu’individus comme de celles des clients et des différentes autres parties prenante du projet de l’entreprise. Les valeurs arrêtées doivent l’être dans le respect des valeurs communément admises à un moment de l’évolution de la société. Elles ne doivent pas pourtant en être le décalque. Le projet et la raison d’être de l’entreprise mobilisent pour leur réussite certaines valeurs bien spécifiques.

C’est dans la pertinence du choix des quelques valeurs porteuses de la réussite du projet et dans l’effort fait pour aboutir à ce que ces valeurs soient effectivement incarnées au quotidien que dépendent la performance et la mise en œuvre de la stratégie de l’entreprise.

Le choix des valeurs n’est pas un conformisme à la bien – pensance du moment ou aux modes managériales et organisationnelles

Une entreprise qui adopte son modèle de celui d’autres entreprises sans être certaine de sa pertinence pour le projet qu’elle est censée porter ne délivrera au mieux que la promesse du concurrent. Il est rare que cette promesse soit la vôtre.

Il n’est pas non plus du ressort du système de valeurs de l’entreprise d’afficher et de décliner toutes les valeurs portées à un moment donné par la société dans son ensemble.

Ses principes se doivent de relever de la famille des valeurs défendues par la société. Ils se prennent et se révèlent sur cette toile de fond. Ainsi, l’organisation doit prendre garde à être vigilante aux évolutions de ces valeurs sociétales. Elle court sinon le risque d’être rejetée par tout ou partie des parties prenantes de son écosystème. Par contre, et encore et toujours, elle doit sélectionner et définir très concrètement celles de ces valeurs qui portent son projet en toute congruence.

Le soft au fondement du hard : condition de sa pertinence et de son efficacité

« Le soft est l’esprit du hard. »

Le modèle de congruence développé par David A. Nadler et Michael L. Tushman  distingue comme constitutif de l’organisation et du fonctionnement de toute organisation deux grandes composantes : le soft (les personnes et la culture) et le hard (les tâches et la structure).

L’apport du modèle est d’insister sur la nécessaire cohérence, le nécessaire alignement de chacune de ces 4 composantes deux à deux avec pour objectif de délivrer la promesse faite par l’entreprise à son marché dans le respect de sa raison d’être.

J’irai plus loin en affirmant que si hard et soft doivent être cohérents et alignés entre eux, c’est au soft de donner le « la ». En définitive, « la structure » et même, ce qui peut paraître moins intuitif, « les tâches » gagnent à être le résultat des valeurs et de la culture constitutives du soft.

Les valeurs réellement mises en œuvre dans l’organisation (qu’elles soient ou non affichées) sont au principe des décisions et donc de chacune des actions de l’entreprise. Aussi les structures et les tâches qui résulteront directement de ces principes auront d’autant plus de force à délivrer le projet de l’entreprise. Ainsi le hard sera-t-il d’autant plus solide qu’il sera enfanté par le soft. Un soft lui-même précisément défini et choisi comme matrice de la promesse de l’entreprise.

Le système de valeurs de l’entreprise : son âme et son essence

Le choix que l’entreprise fait de son système de valeurs  est essentiel au sens propre du terme. Il en est l’essence, l’esprit, l’âme, la nature profonde.

Ce choix, s’il est porté par la réelle volonté d’en faire le fondement de son fonctionnement et de son système de décisions, dictera le design de l’organisation et du fonctionnement de l’organisation. Ceux-ci ne peuvent être conçus sans se référer à ce qui fait et motive le projet de l’entreprise. En l’absence de ces repères, c’est à une société sans principes que l’on aboutit.

 Culture et prise de décision

Partager une culture, c’est partager une façon de décider et de se comporter, lorsqu’on se trouve confronté à une situation quelle qu’elle soit. La culture est au fondement de la prise de décision. Elle en est, en quelque sorte l’algorithme. Au quotidien, et à bien y regarder, c’est notre culture qui décide à travers nous.

Les cultures se différencient entre elles, entre autres, par la latitude qu’elles laissent à chacun en matière de décision. Elles accordent plus ou moins d’autonomie à chacun dans la réponse que chacun de nous apporte aux décisions  à prendre face aux situations auxquelles nous rencontrons.

Culture et partage

A bien y regarder, et au-delà du partage de la seule décision, une culture se définit par l’importance qu’elle apporte ou non au partage des leviers de son système.  Cela concerne fondamentalement le partage plus ou moins grand de la décision. Cela concerne,  également et plus largement , le partage du savoir et de l’information, le partage de la parole, … et, pour finir, le partage du résultat.

Cette liste et les choix que l’entreprise fait du positionnement du curseur quant au partage sur chacun de ses éléments dictent directement la configuration de son organisation et de son management. Et la réalité de sa culture devient tangible dans la réalité tangible de ce partage.

Dès lors, tout écart entre des valeurs déclarées et non traduites dans la réalité du partage constaté est facilement et fortement perçu. Il génère un ressenti d’autant plus grave que les contributeurs au projet de l’entreprise le vivent comme un non-respect du pacte implicite passé entre les parties prenante à ce contrat.

En conclusion : les valeurs sont une promesse. Une promesse que l’entreprise qui pose ainsi sa « marque » se doit de respecter. Et cela non seulement par respect d’une parole donnée mais dans son intérêt économique.

Les valeurs d’une organisation ne relèvent pas du domaine de la communication. Elles sont en fait un contrat qui est passé avec l’ensemble des parties prenantes de l’entreprise. Elles sont une promesse faite par l’entreprise au marché et à chacune de ses parties prenantes. Une promesse qu’elle se doit de respecter en s’organisant par ses structures et par l’organisation de ses processus et tâches. Un contrat qui du soft oblige au hard.

La confiance est à ce prix et cette confiance n’a pas de prix.

 

 

 

 

 

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03/10/2021 – La culture d’autonomie n’est pas naturelle ! Et pour cause !!!

David Autissier et Jean-Yves Guillain publient un article dédié à l’autonomie des équipes et des personnes dans lequel ils rendent compte de leur travaux de recherche pour identifier les leviers de l’autonomisation ( » Autonomie des équipes et des personnes, le challenge du management hybride » – Forbes, 30/09/2021)

Comme eux je pense que ce concept d’autonomie est central. Il est au principe de toute réflexion en matière de l’organisation et du management de l’entreprise. Aussi, est-il fondamental d’en traiter clairement et d’en tirer toutes les conséquences.

La lecture de cet article que je recommande m’amène aux deux remarques suivantes. Elles concernent 1) la notion de partage et 2) celle de culture d’autonomie.

1) La notion de partage

L’autonomisation est effectivement, comme le posent David Autissier et Jean-Yves Guillain, le partage du pouvoir et, dans ce cadre, il doit être recherché un équilibre entre pouvoir et contrôle.
Cette notion de partage est bien au cœur du sujet. Mais il l’est, selon moi, non seulement en ce qui concerne l’autonomisation mais également en ce qu’il concerne les autres composantes constitutives de l’organisation et du fonctionnement de l’entreprise. Aussi, le partage du pouvoir ne peut être envisagé sans envisager en même temps celui de la stratégie, de la décision, du travail et du résultat. C’est du positionnement du curseur en matière de partage sur chacune de ces 4 composantes (du moins au plus partagé) que les l’organisations se différencient (Organisation hiérarchiques, organisations participatives, organisation collaborative).

2) La culture d’autonomie

Par ailleurs, mais cette remarque est intimement liée à ma remarque précédente. David Autissier et Jean-Yves Guillain dans leur article font de la culture le 5 ème et dernier levier de l’autonomisation. Il me semble bien au contraire qu’il est le premier et finalement le seul levier déterminant, littéralement au principe de l’autonomisation.

Ils écrivent (je les cite) : « La culture de l’autonomie n’étant pas naturelle, … ». J’ajouterai qu’aucune culture n’est naturelle. La culture est précisément ce qui n’est pas naturel.  Le terme d ‘autonomisation » renvoie à un processus de changement en cours. L’autonomisation ne peut aboutir à une transformation réelle que par un changement de culture. Cette culture est faite de responsabilité et de partage porteuse d’un projet commun. Remarquons que le terme même de « responsabilisation » et d’« empowerment » incluent une notion de devenir (un changement). Ce changement ne donnera lieu à une transformation réelle que lorsqu’il y aura un réel changement de culture.

De même l’on peut s’étonner du fait que « empowerment » soit traduit par « responsabilisation », alors que littéralement le terme signifie : « donner le pouvoir » au sens de «  donner la force de … ».

En l’absence des valeurs porteuses de l’autonomie aucun des 4 autres leviers cités par les auteurs comme préalables ne peut jouer. Ces valeurs doivent concerner non seulement le travail et la décision mais également la stratégie et le résultat.

Un grand merci à eux deux de cette occasion d’échange sur ce sujet fondamental.

 

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25/06/2021. Qui opère en stratège. Interview d’Yves Richez – 2/3


Les potentiels et leur détection

 

1. Les potentiels
2. 
L’« Etre » (Occident) et l’« Ecart » (Chine)
3. 
Les trois lointains
4. La détection des potentiels
5.
De quelle promesse le potentiel est-il porteur ?

(Note : les mises en caractères gras sont le fait de RéSolutions)

1. Les potentiels.

Vous insistez sur l’importance d’être attentifs aux potentiels (qui par nature existent avant même d’être révélés) et de porter une grande attention à leur détection.

Comment définissez-vous un potentiel ?

  A l’instar de mes réponses précédentes, je cherche avant tout à signifier un mot, c’est-à-dire lui donner son sens correct et exact. J’ai exploré le mot potentiel pendant 7 ans. Définir un mot est un abus de langage, car l’on ne définit pas un mot, mais ce à quoi il se rapporte.

Et pour cela il y a des règles qu’il n’est pas utile d’aborder ici. J’ai signifié le terme à partir du grec, du latin et du chinois.

Il me semble important de rappeler qu’un mot ne vaut que par celui qui le précède et celui qui le suit.

C’est pourquoi, en Occident la signification du potentiel nous vient du latin potentialis, qui signifie « puissance » qui a dérivé au 19ème siècle vers le sens de virtualité et éventualité. On retrouve chez les grecs cette idée de puissance, avec le terme kratos, conduisant à cette élaboration d’autos-kratos, ou, l’homme « tout puissant » sur le monde – afin de prouver son émancipation des Dieux de l’Olympe. L’accès à la Vérité (alethêia ), à la raison (logos), à l’action de comprendre (mathésis), et à l’âme (psukê) etc., virtualise chez l’humain d’Occident la croyance, puis la certitude, qu’il peut tout de lui-même et par lui-même : « on a tout en soi » est certainement l’une des illustrations les plus étonnante de cette croyance.

Le mot virtualité, du latin virtualis, signifie, qui n’est qu’en puissance, juste à l’amont de l’actualisation, c’est-à-dire, ce qui devient effectif (donc qui s’inscrit dans la réalité). Le terme potentiel va ensuite signifier, la somme des forces pour qu’un système devienne actif. La dépression au large, la haute marée et la lune conduisent à une somme de forces pour que la vague soit, du point de vue du surfer, « idéal ».

Côté chinois, la notion de potentiel peut s’appréhender par che (shi). Mais che est indissociable de la configuration (shi-wei / moment-position) et de l’appréciation des tendances, de la propension générale (da shi). Côté occident, le potentiel s’est substantivé pour devenir un « quoi » mesurable. Il s’est décliné à la personne (elle a du potentiel), jusqu’à devenir un critère identitaire (un haut-potentiel). Le mot a été coupé et détourné de son principe opérant, efficient et dynamique, pour devenir une modalité technique et psychologique ; « On a du potentiel, on est un potentiel, il y a du potentiel, etc ».

Ces expressions sont ennuyeuses, car elles utilisent un mot en dehors de son sens pour lui attribuer des valeurs et des qualités qu’il n’a pas.

 2. L’« Etre » (Occident) et l’« Ecart » (Chine).

 Vous insistez sur la notion d’« Entre » et « d’Ecart » sur lequel vous avez construit tout votre travail. Le potentiel est au cœur de cette notion d’écart. Vous rappelez que ce potentiel n’est pas une composante de l’« Etre ».

En quoi cette différence est-elle importante et quelles en sont les conséquences ?

 Il faut rendre à « César ce qui lui appartient ». Je dois cet emprunt de l’entre et l’écart [1] à François Jullien, sinologue, helléniste et philosophe.

Je ne sais pas si j’insiste sur ces deux termes. Je les utilise pour ce qu’ils offrent comme sens correct.

Le terme entre implique de l’espace, quant à écart, il implique de la distance. Ce dernier offre l’avantage d’objectiver, puisque de l’écart, il est possible de regarder l’objet à distance. L’écart n’est donc pas la différence. De l’une, il y a un lieu d’où l’on regarde en face, alors que la différence se subjective par ce qu’elle implique de distinction et de comparaison. Ceci différent de cela, lui différent de l’autre : « Ce manager est bien différent de l’autre, regardez comme il a du leadership ». Il y a de la différence entre la langue italienne, allemande, française et anglaise, mais il y a de l’écart entre la langue autant que l’écriture française et la chinoise. L’une est sémantico-consonantique, l’autre est idéo-pictographique. Sans comparaison, il n’y a rien à juger.

De l’entre, il y a de la virtualité, la pensée ne peut s’égarer dans l’abstrait ou dans les idées ; nous pourrons à ce sujet rappeler que la perspicacité et le discernement sont les qualités inhérentes à la capacité de distinguer dans l’entre les situations, les choses, ce quelque chose que le plus grand nombre de remarque pas.

Donc, oui, d’une part, le potentiel n’est ni critère psychologique, ni un critère technique, car le potentiel s’amorce dès lors qu’il y a de l’entre – donc de l’espace – ou de l’écart, de la distance. Entre les falaises, il était possible de construire un pont. Dans l’entre les marées, les pêcheurs écument les rochers…

Le potentiel est par conséquent tressé, lié, inhérent, inséparable de l’entre et de l’écart. Je reviens sur mon image du surfer.

Sans les facteurs externes à lui, et sans la configuration des côtes, l’océan ne pourrait produire cette houle qui va s’actualiser en vague surfable. Entre la côte et les hauts fonds, il y a cet entre duquel, la mer se virtualise, puis s’actualise en vagues. Il faut un moment (shi) et une position (wei) spécifique, pour que la convergence de ces forces offre une vague lisse et puissante accessible au surfer.

Sans entre ni écart, le potentiel ne peut ni s’amorcer, ni se virtualiser, donc ne peut s’actualiser. Sans internet, Google, n’existerait pas.

Vouloir exploiter ce qu’un potentiel offre sans l’intégrer dans ce qu’il implique d’entre et/ou d’écart, c’est comme vouloir surfer sur une mer à marée basse.

C’est pourquoi, vouloir montrer la différence entre les personnes (les êtres) en pensant que cela va contribuer à favoriser la diversité est une erreur. Cela va au contraire accentuer les comparaisons humaines, encourager l’hypertrophie identitaire de celles et de ceux qui sont « plus ceci ou plus cela » par rapport aux autres.

L’ornithorynque est un mammifère, mais il n’est pas différent des humains, il est à l’écart. Il pond des œufs.

C’est en travaillant sur les écarts entre les humains que l’on pacifiera les Société et ses organisations, quelles qu’elles soient. La différence et la subjectivité sont le potentiel à partir desquels, l’être tire ses idées néfastes et belliqueuses. C’est pourquoi, je n’utilise plus le mot « être » devant humain, afin de lui enlever tout pouvoir de comparaison, de subjectivité, et par conséquent, de possible nuisance.

3. Les trois lointains.

 Vous insistez sur l’observation comme moyen de détection de ces potentiels. Vous insistez, là encore, sur les différences en la matière entre les façons de regarder occidentales et chinoises et vous insistez notamment, pour cette dernière, sur une façon de regarder très particulière : celle des « trois lointains ».

Pouvez-vous nous préciser en quoi ces façons de regarder et de voir diffèrent ?

 Au cours des trois dernières années, nous avons formé ou sensibilisé plus 600 managers à la compétence « observer ». Il est étonnant de constater à quel point, nous, humains d’occident, avons « perdu » cette faculté. Pourquoi ?

Parce que l’on confond voir, regarder et observer. Voir, vient du grec idein (voir et avoir vu), il découle de l’infinitif aoriste horân (idée). Voir par les « yeux de l’esprit », ou encore « le troisième œil », « l’œil de l’âme » précise Descartes.

Aristote, dont la pensée imbibe largement les modèles managériaux de l’entreprise, a posé le sens de la vue comme « le meilleur des sens », car dit-il :

« Il nous fait connaître beaucoup de choses distinctement, ainsi la fécondité est-elle la meilleure qualité de l’intellect, car elle apporte la découverte de nouvelles vérités[2] » . Certes, on « voit » les choses, mais pour les comprendre, pour les « analyser » : « je vois ce que vous dites ».

Pour un occidental, la vue est féconde, non par ce qu’elle rend disponible ce qui est autour de nous, au-delà de nous, mais par les vérités qu’elle nous apporte. Là où la notion de fécondité, côté chinois, signifie la compossibilité, c’est-à-dire l’ensemble des possibles qu’offrent une configuration. Le potentiel participe à offrir de la fécondité.

L’étude des trois lointains[3] (san yuan, 三远; plan, profond, haut) fut particulièrement ressourçant. Ces lointains impliquent que le regard, à l’instar de celui des grecs, ne s’égare pas dans les « idées », mais scrute, regarde, observe, s’attarde, discerne, ce qu’au loin, de près (au plan), de haut, de profond, les choses s’amorcent, se déploient, puis, ou non s’actualisent. Là où nous, nous allons « analyser le problème », « voir ce que les experts en disent », « poser les arguments ».

Les trois lointains sont les bases de l’observation. En effet, observer signifie le déplacement du regard dans l’espace et le temps. Le regard suit l’évolution d’une chose, tel un bourgeon devenant fleur, puis amorce d’un fruit et ce, jusqu’à sa taille et sa couleur effective. J’observe quand mon regard ne met aucune idée entre la chose suivie et mon regard. L’observation est donc processive. Et cette qualité n’est pas favorisée dans le pays de l’analyse et de la réactivité à outrance.

Regarder, quant à lui, est local. Regarder de devant, de dessus, de dessous, de côté, de haut, de biais, etc. Regarder implique un déplacement. C’est ce déplacement qui participe à faire expérimenter aux personnes la nuance entre « avoir un point de vue », et « tenir une vue du point ». Les managers sont entraînés à observer, à regarder et à moins « voir ».

Il faut nous rappeler que notre langue et son histoire, sont structurées pour « abstraire », terme qui signifie séparer :

« L’abstraction est une opération de l’esprit, par laquelle nous ne considérons, dans un objet, qu’un des attributs, sans faire attention aux autres propriétés qu’il renferme »

peut-on lire dans le Dictionnaire philosophique de 1762.

Côté chinois, le lointain profond (shenyuan) implique cette idée de profondeur où se superposent des couches de montagnes, de forêts, de nuages, etc. Le surfer scrute au lointain profond cette ligne sombre, la houle, qui pour l’instant s’amalgame avec l’horizon. Il scrute du regard pour percer derrière (kui). Il faut donc se placer devant pour percevoir au loin ce qui s’amorce. Le processus est similaire pour le lointain plan et le lointain haut, mais avec les formes de regard appropriées.

Les managers formés expriment souvent leur frustration, jusqu’à manifester parfois de l’agacement face à cette compétence de l’observation qu’ils considéraient comme « acquise ».

Dans les faits, loin d’en avoir la compétence, ils superposent à celle-ci cette vue que le système occidental valorise, celle qui rend les gens « brillants », sans pour autant « éclairer » et c’est dommage, car l’observation est ce par quoi il est possible d’éclairer l’esprit d’autrui. Ils redécouvrent la simplicité de cette faculté sensorielle, puis par extension découvrent l’extraordinaire ressource pour leur quotidien : recrutement, évaluation, décision, détection des talents, etc.

 4. La détection des potentiels

En quoi l’approche occidentale est-elle si différente. Toute réflexion stratégique intègre l’observation des menaces et des opportunités. Ne met-elle pas alors en œuvre cette exigence d’observation des potentiels favorables ou défavorables pour l’entreprise ?

Merci beaucoup de cette formulation « menace et opportunité », héritage, entre autre, du modèle de décision S.W.O.T. Il est lui aussi ennuyeux, car, il conduit à faire de l’analyse (analusis) alors qu’il convient de se déplacer dans la « vraie vie » pour regarder autant qu’observer ce qui se déploie. Que l’on parle de menace en situation réelle, parce-qu’il y a des personnes dont l’intention est de détruire physiquement des biens et/ou des personnes, est ici entendable. Mais peut-on parler de menace dans l’entreprise ? La concurrence est-elle une menace ? puisque le mot signifie : qui a prétention d’égalité. 

Votre expression « réflexion stratégique », montre aussi l’habitude de pensée. Il n’y a pas de réflexion stratégique, il y a un opératoire stratégique que la pensée traduit en expériences plausibles, puis en décisions. On réfléchit à un problème (problema), car la réflexion procède d’un décorticage pour lequel, l’analyse peut être mobilisée (ou pas).

En stratégie, le cours des choses n’attend personne, vous l’épousez, ou il vous submerge. L’histoire récente l’illustre.

Pourtant, les grecs maitrisaient cette compétence tressée de qualité : l’observation. J’en ai fait l’étude approfondie en découvrant les nombreuses nuances dont voici quelques exemples :

  • enkukleîn, encercle le « problème » (vivant, situationnel), observe sans être vu,
  • kraipnóteros, esprit prompt aux situations,
  • pantopóros, élabore/tresse un chemin de ressources,
  • ithunein, dirige, redresse, mène droit (par prévision et regard fixé sur résultat),
  • eustochia, la sûreté du coup d’œil
  • oxú, regard aigu, la vue perçante

Plus les organisations sont grosses, politiques et hiérarchisées, plus la compétence d’observation tend à disparaître. Face à l’évidence, la stupéfaction des « élites » se voit souvent mise devant le fait accompli : l’analyse est mise en défaite.   Les grecs ont d’ailleurs un mot pour l’exprimer : ápatā : laisser l’autre éberlué face à la défaite. En stratégie, sans observation, l’analyse est vouée à la défaite.

L’usage et le recours à une sémantique guerrière en entreprise est inappropriée. Il faut bien comprendre que le mot menace implique un risque vital engagé pour la vie d’autrui ou pour un existant. Perdre des parts de marché ne peut être élevé au rang de « menace », c’est le jeu.

L’opératoire stratégique, certes vient, d’un usage de la guerre, mais, cet opératoire stratégique, pour lequel l’observation est par principe associé peut avoir d’autres usages, dès lors qu’il concerne le flux tendanciel des « choses ».

Enfin, gardons à l’esprit que les mots favorables et défavorables signifient ce qui tend vers le résultat escompté ou ce qui s’en écarte, conduisant à des conséquences non souhaitées.

 Quelles limites voyez-vous, dans ce domaine, à l’approche occidentale ?

  Qui voit trop, est aveugle aux signes et aux corrélations qui en découlent.

Nous, occidentaux, possédons un instrument de pensée extraordinaire. Mais, nous avons considérablement perdu en maitrise de notre langue, des nuances des termes et de leur usage correct et exact. Certes, nous excellons en grammaire et en orthographe, mais si les mots sont mal utilisés, à quoi cela sert-il ?

Nous faisons du bruit avec nos bouches et pensons en apesanteur. Les mots ne touchent plus terre, car nombre d’entre eux ont été détourné de leur sens et de leur usage initial. Il n’y a plus de sens, car le sens a été oublié, perdu au profit de termes multi-usages : analyse, talent, compétence, intelligence, objectif, stratégie, sont des mots de ce type.

La « guerre » des idées, obstruent le regard sur le monde. Voici, me semble-t-il où se situe la limite. Le mot stratégie s’amorce par le son « str », qui implique un tremblement dans l’espace. L’opératoire stratégique, identifie ce qui commence à vibrer, à trembler dans le cours des choses, même de manière infime.

5. La promesse du potentiel

De quelle promesse un potentiel est-il porteur ?

  L’observation permet d’être en éveil sur des évolutions en cours d’apparition. Un potentiel ne fait aucune promesse, ce n’est pas une personne, mais une puissance en acte.

Comment détecter le potentiel dont ces évolutions sont grosses et la promesse qu’elles portent ? Comment détecter et valoriser ces potentiels ? Quels sont les signes annonciateurs de ces potentiels ? De quelle nature peuvent-ils être ?

Le potentiel se détecte s’il y a quelqu’un pour observer le monde, une configuration, le cours des choses. Pour que le potentiel soit détectable par observation, il convient qu’il puisse y avoir un usage, un résultat escompté, une utilité à celui-ci. Le vent est un potentiel continu pour le navigateur, mais aussi pour les « fabricants » d’électricité (éolienne).

Une personne peut être le potentiel d’une autre, parce qu’elle peut répondre à une utilité, même temporaire. Le terme potentiel est indissociable de configuration et d’utilité. Trouver l’utilité (l’avantage pratique) et vous pourrez détecter le ou les potentiels.

Comment et sur quelle base choisir les potentiels auxquels on décidera de se consacrer pour accompagner leur actualisation ?

Votre question est vraiment intéressante, car elle pose l’hypothèse du choix. Le potentiel, comme je l’ai dit est une puissance en mouvement (une somme de forces, une disposition favorable). Dès lors que le résultat est explicité et signifié, dès lors que l’utilité est clarifiée, les potentiels sont « épousés » pour les orienter à notre avantage. Le potentiel n’est pas un objet (objectum), ce n’est pas une chose, mais plutôt le possible et l’advenir à actualiser. Il faut un esprit en capacité de produire une expérience de pensée pratique pour conduire le potentiel vers son actualisation.

Enfin, le potentiel ne nous attend pas. Ce n’est pas nous qui l’accompagnons. Le surfer épouse la vague. Celle-ci déferlera avec ou sans lui. La vague est indifférente au surfer, elle ne lui parle pas. On épouse donc le potentiel, on ne l’accompagne pas, comme l’on accompagne un enfant à l’école.

 Les potentiels humains

 En abordant la notion de « potentiel humain », je vous cite : « L’Homme n’a ni tout en lui, ni « de » potentiel à proprement parler, mais il possède ou peut développer les habiletés, les compétences pour traduire les « forces » du réel à son avantage. Cette notion est importante, voire fondamentale, car c’est ici que réside l’écart le plus important avec les « classiques ». 

Vous insistez dans vos travaux sur le fait que l’on n’a pas un potentiel, et que l’on n’est pas un talent. Qu’entendez-vous par là ?

 J’ai, d’une certaine manière, répondue en amont à cette question. Le potentiel n’est pas quelque chose que l’on a en soi. C’est une vue de l’esprit, un héritage désuet des temps classiques. Cette idée pourtant ancrée, par principe subjectif, conduit à tous les extrêmes en termes de jugement, de mesure de « ça ». Nous avons (trop) peu évolué sur ce point. Nous continuons à perpétuer des idées issues de la religion, du mystique, et des idées.

 

 « TalentReveal », l’entreprise que vous présidez, travaille à la mise en valeur des potentiels et talents humains.

 En quoi, les travaux de votre thèse ont-ils influé sur la façon de TalentReveal d’aborder et de pratiquer son activité. Quelle différence entre le avant et le après de votre thèse ? En quoi l’approche de TalentReveal se particularise-t-elle d’approches traditionnelles d’intervenant dans ce domaine ?

Deux temps dans ma réponse.

Le premier répond à votre propos « travaille à la mise en valeur des potentiels et talents humains. »

Nous cherchons avant tout, non à mettre en avant les potentiels et talents humains, puisque comme je l’ai dit, ce sont des vues de l’esprit. Nous œuvrons avec nos clients à l’objectivation des talents et au développement de nouvelles formes de compétences utiles pour détecter les potentiels. C’est une nuance de fond.

Les personnes n’ont pas de talent, elles en produisent. Ce simple écart de pensé, nous a conduit à collaborer avec Pôle Emploi pendant presque trois ans. Nous avons transféré les connaissances et entraîné les compétences de centaines de managers dans « la détection des talents ». Nous avons en parallèle formé près d’une trentaine de professionnels à cette méthode, pour un déploiement au niveau national. Les résultats sont « immédiats » (sous quinze jours), et c’est normal, puisqu’ils reprennent la main sur leur compétence d’observation, de description etc.

Le second temps : ce que ce travail a changé ? Tout.

D’abord, la capacité de ne pas se laisser abuser par l’usage inapproprié des mots. Puis, la compétence de pouvoir utiliser et produire de la méthode et de la compétence utiles et appropriés aux situations, enfin, la possibilité d’offrir à nos clients une richesse, une nuance et un éventail de connaissances pratiques et souvent oubliés au cours du siècle passé.

Nous ressourçons le possible de nos clients. En cela, nous sommes leur potentiel.


Si c’est « qui opère en stratège » qui est capable d’identifier un potentiel utilisable pour sa stratégie, comment la personne porteuse d’un potentiel peut-elle elle-même identifier son potentiel?

 C’est ici, l’approche classique. La personne n’a pas besoin d’identifier son potentiel, puisque par principe, elle « est » le potentiel de l’autre, du projet, de la situation. La confusion et l’amalgame entre potentiel et intelligence a conduit à croire que le potentiel est un « quoi » que l’on peut connaître et mesurer. C’est une erreur. Le vent n’a pas à se demander s’il est un potentiel. Le vent se déploie, souffle, pousse, c’est à l’autre d’en tirer l’avantage, pas au vent de « se penser ».

 Les potentiels au-delà des potentiels humains.

Cette notion de potentiel s’applique au-delà des potentiels humains à tous types de potentiels quelle qu’en soit la nature.
Vous mettez en œuvre cette notion dans vos accompagnements d’entreprises.

En se limitant ici, à la dimension détection du(des) potentiel(s)  (nous verrons dans votre troisième interview la dimension « actualisation »), pouvez-vous nous donnez une illustration de son application au domaine de l’entreprise au-delà du domaine des ressources humaines ?

Le modèle économique « classique » arrive à sa conclusion ; certes à l’échelle de notre culture, elle va continuer encore quelques décennies, mais le modèle est désormais « obsolète ». Le potentiel, on peut l’observer, est la réintégration de l’humain avec la nature. L’Être a fait son temps, et avec lui, ses réussites et ses destructions. L’Humain est un potentiel pour le vivant et réciproquement. C’est de là que nous devons observer les potentiels. D’ailleurs, Adam Smith, j’y reviendrais, l’avait bien noté. Mais, mal traduit, on lui a fait dire ce que pourtant, il n’a jamais dit ni pensé.

La perma-économie autant que la perma-humanité sont les potentiels déjà observables, ce sont eux qu’il convient, me semble-t-il, d’épouser. L’ancien monde ayant épuisé sa ressource.

 

Un grand merci à vous pour ce partage. Nous vous retrouverons début septembre pour la suite de la troisième partie de cet entretien. Nous aborderons alors en quoi et comment « actualiser » ces potentiels.

 

[1] JULLIEN F., L’écart et l’entre. Leçon inaugurale de la Chaire sur l’altérité, Editions Galilée, 2012

[2] Aristote, Métaphysique, Livre A. 1 [980a 21], trad., Duminil, Jaulin, 2008.

[3] Les trois lointains sont proposés par le peintre-lettré Guo Xi, grand peintre d’origine des Song du Nord et grand maître paysagiste (1023-1085).

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Je contribue donc j’existe.

Je contribue donc j'existe.

Il est frappant de constater l’émergence actuelle de deux notions concomitantes : la demande de sens et la prévalence de la recherche d’impact.

Au moment même où l’absence et la perte de sens sont ressenties et dénoncées par beaucoup, la notion d’impact prend les devants de la scène. L’impact négatif et destructeur de l’homme et de ses entreprises sur l’environnement et sur la société est décrié. L’homme comme ses entreprises sont aujourd’hui sommés d’avoir un impact positif. L’anthropocène met l’homme sur le devant de la scène et lui donne un rôle de deus ex machina (1) en charge d’impacter le monde positivement.

(1) Personnage ou événement inattendu venant opportunément dénouer une situation dramatique.) (Deus ex-machina :CNTRL)

Cette invocation ne laisse pas d’interroger sur sa signification profonde et quasi … phallique. Elle n’est pas sans évoquer son Docteur Fol Amour chevauchant sa bombe et qui jubile en attendant l’impact.

« Impact » inéluctablement dit « choc »  : « Attention, impact dans …15 secondes ». Même adorné de son qualificatif « positif » et si les mots ont un sens, « Impact » signifie la collision, le heurt entre deux corps. Dès lors, il est difficile d’envisager qu’un impact puisse être positif. L’impact évoque la puissance et privilégie la puissance de l’impactant sur l’impacté au profit de l’impactant.

L’appel à « l’impact positif » est une injonction à « une puissance qui s’exerce sur … ».

L’incantation actuelle en faveur de la responsabilité sociale et environnementale (RSE) de l’entreprise  invite chacun de nous et de nos entreprises à avoir un impact positif. Cette invocation vaut pour toute notion d’entreprise et donc pour toute action (qu’elle soit celle d’une entreprise ou d’un individu).

L’impact est le maitre mot de l’anthropocène où l’Homme exerce un impact (et quel impact !) sur le Monde. Chercher à avoir un impact sur c’est rechercher à maîtriser l’objet impacté (objet ou homme alors ramené au rang d’objet) pour lui donner sa forme … en le « cabossant. »

Une telle incantation est, d’ailleurs, à bien y regarder, plus une exhortation à ne pas avoir un impact négatif qu’une invitation précise à un impact positif déterminé.

Et si, au lieu d’exhorter à « impacter sur … » l’on appelait et invitait plutôt à « contribuer à … » ?

Plutôt que d’inciter chacun de nous à laisser des « traces d’impacts » sur le Monde et la Société ne vaut-il pas mieux se focaliser sur les contributions que chacun de nous et les entreprises qu’il mène ou pilote sont à même d’apporter à la Société et au Monde ? Ne vaut-il pas mieux, en laissant à chacun le choix des projets auxquels il entend contribuer, valoriser et encourager ces contributions ?

En priorisant cette notion de contribution et en conduisant chacun, au moment de décider de son action, à se questionner : « A quoi ? et en quoi ? est-ce que je contribue par cette action, par mon entreprise ? » les réponses apportées par chacun donnent le sens de son action.

Pourquoi parler d’impact « positif »?

Dire que son action a un impact positif ne donne pas l’intention de départ de cette action. L’impact vient constater «  après coup » (une fois le coup porté) un heurt et la trace du coup. L’impact ne dit pas l’intention de départ qui a motivé l’action dont l’impact est la conséquence. La contribution, elle, à la différence de l’impact, donne l’intention et guide l’action dans l’atteinte du résultat de la contribution.

Parler de « Contribution » assigne un sens à l’action décidée et convoque « l’autre ».

Parler de « contribution » redonne à l’homme agissant, l’acteur, toute sa dimension non d’ « impacteur » (même positif) mais de créateur de valeur par une participation à une œuvre commune et choisie visant la satisfaction réelle de besoins humains.

En effet, « Contribuer » convoque immédiatement l’autre, les autres, tous les autres acteurs parties prenantes de l’écosystème du contributeur et de son entreprise. Les autres sont convoqués à double titre. Ils sont, d’une part, les autres contributeurs à l’œuvre et au projet commun, et d’autre part et encore plus fondamentalement,  les « bénéficiaires » de la valeur créée par le projet en réponse à leurs besoins, sachant que cette satisfaction des besoins est la seule réelle justification possible de toute entreprise.

La définition autoporteuse de la contribution. « Je contribue » : « j’apporte ma part à une œuvre commune ».

Il est frappant de constater que, contrairement au terme « Impact » (qui a, en soi, une connotation négative), le terme de « contribution » a, en soi, une connotation positive. J’apporte ma part, j’apporte mon tribu.

Le terme renvoie à deux dimensions qui, toutes deux, sont intéressantes à prendre en compte :
1. La participation (« J’apporte ma part ») à une œuvre commune,
2. La participation aux charges de la communauté (« J’apporte mon tribut »), en conséquence et en reconnaissance de mon appartenance à cette communauté.

Chacune de ces deux dimensions converge pour  donner toute sa force à cette notion de « contribution » et pour la prioriser, entre toute autre notion, comme légitimation de toute action.

La contribution, un concept qui donne tout son sens à l’action.

La contribution justifie et donne puissamment sens à mes actions dans la double dimension de sa définition, à la fois :
1. par la valeur que mon action va apporter à l’œuvre commune (tant dans la réussite du projet que dans la satisfaction des besoins de ses bénéficiaires) et
2. par la part que je prends grâce à ces actions aux charges nécessaires à la préservation et au développement de la communauté à laquelle j’appartiens et grâce à laquelle je vis, survis et me développe.

« A quoi et en quoi est-ce que je contribue ? »

Voilà une double question que chacun de nous devrait opportunément se poser. Et cela que nous soyons simple particulier au moment de décider de nos actions et de les entreprendre ou que nous soyons une entreprise. Répondre à cette question avec réalisme et en toute humilité revient à définir en toute responsabilité sa raison d’être.

Une question existentielle.

Cette question est une question existentielle. Quel est le sens de mes actions et de mes entreprises ? En quoi, suis-je, par ces actions, et en toute humilité, relié et lié au reste de l’humanité ? Ce qui revient, là encore, en toute humilité, à se poser la question de savoir en quoi est-ce que  je contribue à l’humanisation du monde ? En un mot, en quoi suis-je acteur et entrepreneur, créateur de valeur et non seulement consommateur – profiteur et destructeur de valeur ?

« Contribuer » et « Exister » deux notions qui s’enfantent l’une l’autre.

Là encore, les mots ont un sens et celui d’« Exister » (2) et lourd de sens.

(2) Exister : « Avoir une cause : le mot exister signifie par lui-même qu’une chose a une consistance à partir de, c’est-à-dire à partir d’autre chose. Il s’agira de savoir à partir de quoi ce qui existe a son existence. » (Exister : CNTRL)

Ainsi, « Exister »  n’a de sens que par la cause qui me fait exister.

J’existe « pour » et « par » quelle cause ?  

Pour prendre les mots à la lettre (ce que l’on devrait toujours faire) , quelle est la cause qui est la mienne et qui me fait exister ? Quelle est la cause que je sers ? Quelle est la cause à laquelle je contribue ?

Par un retournement des liens de causalité, il n’est pas indifférent de voir dans la cause non seulement la cause qui fait que j’existe en tant que conséquence et résultat mais la cause comme la visée, et la motivation de mon action. La cause qui me fait exister devient alors la conséquence de mon action à laquelle elle contribue. Ainsi, j’existe que par ce que mon action contribue à une cause.

Plutôt que d’exister « parce que … », j’existe « pour que … ».

C’est ma contribution à cette cause, à ce projet qui fait que  j’existe. J’y trouve tout mon sens.

La question est bien celle-ci « Qu’est ce qui fait que j’existe ? Quelle est  la cause de mon existence ? J’existe pour quelle cause ? Quelle est la cause qui fait que j’existe ?

Je ne peux être qu’en agissant …

« L’homme n’est rien d’autre que son projet, il n’existe que dans la mesure où il se réalise, il n’est donc rien d’autre que l’ensemble de ses actes, rien d’autre que sa vie. Sartre, Existent.,1946, p. 55. » CNTRL

… et je ne peux être qu’en agissant positivement, qu’en étant contributeur.

Une action justifiant mon existence ne peut qu’être une action positive de contribution au bien commun.

Au fond du fond on y retrouve la règle «  Ne faisons pas à autrui ce que nous ne voudrions pas qu’il nous fasse ».

Nulle dimension morale à la définition de ce bien commun. Il n’est besoin que de considérer bien humblement notre dépendance à notre écosystème pour nous en convaincre. Celui-ci est fait de l’ensemble de notre environnement et des parties prenantes à notre propre existence qui la permettent et la nourrissent. Il est de notre intérêt vital évident de contribuer à la survie et au développement de notre propre écosystème comme condition de notre propre survie et développement. Prenons soin de notre environnement propre et il prendra soin de nous.

Derrière cette règle de bon sens, l’on retrouve tout le combat écologique qui ne se limite pas à sa seule dimension naturelle et environnemental comme je l’évoquais dans cet article « L’écologie de votre écosystème d’entreprise ».

Soyons « donneur réaliste et stratégique ».

Cette notion est développée par Adam Grant dans son livre « Give and take : why helping others drives our success ». Il y analyse le principe de réciprocité dans lequel deux postures se font face « Je donne » «  Je reçois ». Il inventorie les 3 styles qu’il est possible d’adopter en la matière :

1. le Preneur (Je reçois plus que je donne) ;

2. L’Egalisateur (Je donne autant que je reçois) ;

3. le Donneur (Je donne plus que je reçois).

Il compare ces différents styles possibles et pose la question de savoir quel est le style le plus efficace. A première vue, et en tenant compte de l’assentiment de la Société, le style « Egalisateur » semble gagner la première place sur le podium au détriment du « Donneur » qui se fait avoir et du « Preneur » qui ne peut durer qu’un temps.

Il conclue son analyse par une question à laquelle il apporte sa préférence : « Et si, à bien y regarder, le style le plus efficace était celui du donneur non le donneur exploité mais le « donneur réaliste et stratégique » qui agit pour le bien commun et sans dire oui à tout. »

La règle très utilitariste de ne pas faire à autrui ce que l’on ne voudrait pas qu’il nous fasse se transforme alors en la règle d’or : « Faites pour les autres tout ce que vous voudriez qu’ils fassent pour vous ». Une règle d’or qui est la version positive et en acte de la règle précédente «  Ne fais pas autrui …. » qui négative, interdit, restreint et paralyse et qui incite, de fait, à l’inaction en condamnant l’action par un principe de précaution.

La contribution est hautement mobilisatrice et énergisante en donnant une motivation, un sens à l’action.

Ce qui donne sens à mon action et me permet d’exister, est de prendre part, d’apporter ma part tant à l’œuvre commune choisie qu’aux charges de la communauté qui l’héberge.

L’oxymore d’une « contribution négative »

Nulle surprise au fait que le terme « Contribution » ait une connotation éminemment positive. Une « Contribution négative » serait un oxymore.

En effet, une  » Contribution négative » peut s’envisager de deux façons :

1. Soit je contribue négativement à une action commune (et donc je vise volontairement ou non à ce que ce projet commun échoue),
2. Soit je contribue à une action qui est négative non pour les contributeurs à l’action mais pour ses cibles. C’est, en effet, alors, bien de « cibles » dont il s’agit, au sens de « objet à impacter » et non de bénéficiaires de l’action.

Quelle que soit la façon de l’envisager, une contribution négative détruit de la valeur (soit celle du projet auquel je participe, soit celle de la situation des individus cibles de l’action).

Dans les deux cas, par cette action, je détériore mon écosystème qui finira par me détruire lui-même.

La contribution est créatrice de valeur pour l’œuvre commune, pour ses bénéficiaires et pour chacun de ses contributeurs.

Au delà de la valeur créée pour ses bénéficiaires (qui est sa justification ultime), contribuer porte, en lui-même, le principe et la promesse d’un retour positif pour le contributeur. Ce retour n’est possible que du fait de la création de valeur par l’œuvre commune. Une œuvre collective qui est grosse d’une valeur supérieure à la somme des contributions mises en œuvre individuellement pour la produire. C’est là la force de l’intelligence collective. Une promesse de « sur » valeur qui, toutefois, ne se réalisera que sous réserve que ce projet commun et collectif réponde à un certain nombre de caractéristiques.

Les conditions d’une contribution réelle. 

En effet, la contribution d’un individu à une œuvre commune ne l’est qu’au prix du respect d’un certain nombre de conditions.

Pour trouver tout son sens, et pour que cette contribution soit une contribution véritable il y faut :

1. Un volontariat plein et entier basé sur une volonté délibérée du contributeur (quelle que soit sa motivation) ;
2. L’adhésion réelle à l’œuvre commune résultant d’un libre et réel choix par le contributeur ;
3. La reconnaissance par la communauté de la part prise par le contributeur ;
4. La rémunération positive du contributeur (à proportion de la contribution à la « sur »valeur créée par la contribution.

A défaut de l’une ou l’autre de ces conditions la contribution n’a plus de sens. Elle se trouve, alors, dévoyée de multiples façons.

Elle n’est alors  :

– qu’une adhésion forcée (de manière consciente ou inconsciente) à un projet qui n’est pas le sien ;

– qu’une inefficacité du fait d’une contribution non ré-compensée (au sens premier du terme) par un retour supérieur à la contribution ;

– voire qu’une exploitation du contributeur en absence d’une participation adaptée à la « sur » valeur créée par l’œuvre commune.

Le projet lui-même, objet de la contribution, se doit de respecter un certains nombres de caractéristiques.

Un tel projet, une telle entreprise se doivent d’être positifs, c’est à dire et sans jugement moral, eux-mêmes contributeurs à la Société dans laquelle ce projet vit, survit et se développe.

C’est d’ailleurs là la condition de sa survie. En supposant qu’il détruise de la valeur dans son environnement, il est clair qu’il détruira son environnement et en périra lui-même.

Ce n’est qu’en créant de la valeur pour chacune de ses parties prenantes essentielles, qu’il garantira son développement durable.

Qui ne le ferait pas serait un prédateur. Et l’on ne contribue pas à une prédation, on en est complice.

De l’anthropocène à l’humanocène :
du  » J’impacte » au « Je contribue ».

L’anthropocène est le règne du « j’impacte ». Il est l’âge de l’Homme et de ses impacts sur l’environnement et sur la société. Par opposition et en ayant à l’esprit la nature profonde de la contribution, l’humanocène (terme que je forge en opposition directe à l’anthropocène), est celui du « Je contribue ».  Il est l’âge de l’humain en acte et de la contribution de l’homme à l’humanisation du Monde.

Si l’humanisme est une croyance en l’homme et en sa valeur (3), l’humanocène est le temps de la contribution à la mise en œuvre et la défense de cette valeur, par nos contributions au-delà des simples croyances. Contribuer en est le maitre mot et le verbe d’action. Il n’est plus, alors, temps ni question d’impacter mais de contribuer en toute humilité et en toute humanité à l’humanisation du Monde.

(3) Humanisme : Théorie, doctrine qui place la personne humaine et son épanouissement au-dessus de toutes les autres valeurs. Le Robert

Un questionnement salutaire et une règle de vie porteuse de sens.

En synthèse, substituons à l’exhortation d’ « impacter », la règle de vie qui est celle de répondre clairement à la double question «  A quoi et en quoi je contribue ? »

Y répondre peut- être l’affaire de toute une vie. Se poser, en permanence cette question est, à défaut d’avoir une réponse claire et définitive, un salutaire moyen de questionner le sens de son action et d’y trouver un sens.

Nous verrons que cette priorisation de la contribution n’est pas sans impact sur un certain nombre de composante de notre édifice social. Elle questionne, entre autres, la responsabilité individuelle de chacun d’entre nous au sein de la Société. Elle questionne la notion même d’entreprise et de participation, les modes de management et d’organisation de l’action, voire même, et de manière  directe, l’évolution de nos systèmes d’enseignement et particulièrement de la formation professionnelle.

 

 

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En levant le voile de l’Holacratie.

Comment, en levant le voile de l’Holacratie, en découvrir et apprécier ses apports.

UNE PRÉSENTATION TRADITIONNELLE DE L’HOLACRATIE QUI FAIT PEUR ET QUI PEUT REBUTER ET C’EST GRAND DOMMAGE…. , À MOINS QU’ELLE N’ATTIRE MAIS POUR DE FAUSSES RAISONS.
  1. Le titre lui-même qui n’évoque rien et qui ne fait que renvoyer son auditeur à son ignorance (en effet qui connait l’Holon dont il est tiré ?)
  2. La façon dont cette approche est vantée. La littérature qui décrit l’approche met, en effet, en avant la perte du pouvoir du patron traditionnel, l’absence de chef, la disparition du manager, la liberté enfin mise en œuvre dans l’entreprise…. Ce qui dans l’esprit des non avertis renvoie vers l’entreprise libérée, mouvement avec lequel la démarche ne saurait se confondre.
  3. Sa mise en opposition à la structure traditionnelle pyramidale.
  4. Son pragmatisme qui serait une force en matière de mise en œuvre de la stratégie qui ,dans ce cas, ne devient que perpétuelle adaptation aux changements survenus dans l’environnement de l’entreprise. Ce qui renvoie tout porteur de vision à long terme à un statut de doux illuminé qu’il convient de faire taire en lui opposant la réalité du jour le jour.
ET TOUT CELA AU DÉTRIMENT D’UN CONTENU TRÈS PERTINENT et opérationnel.

Sans chercher l’exhaustivité de ses apports, j’en retiens pour ma part les trois suivants :

  1. Une approche de l’organisation et du fonctionnement de l’entreprise par les rôles et non par les postes
  2. Une revue régulière de la pertinence des rôles et de leur besoin avec si besoin une évolution voire une suppression des rôles devenus inutiles et création des nouveaux rôles nécessaires.
  3. La prise en compte des tensions et leurs résolutions par les réunions de synchronisation. Chaque collaborateur par les tensions qu’il ressent est un capteur très utile à la détection de la pertinence de l’organisation et de son fonctionnement. Leur acceptation positive et la reconnaissance du potentiel de progrès que ces tensions contiennent est un facteur essentiel de l’adaptation progressive de l’organisation à sa mission et à son environnement.
EN FAIT, EN RENTRANT RÉELLEMENT DANS LE FOND DE L’APPROCHE, IL APPARAÎT QUE CHACUN DES ÉLÉMENTS QUI PEUT FAIRE PEUR N’EXISTE PAS ET QUE SEULE LA FAÇON DONT CES ÉLÉMENTS SONT PRÉSENTÉS ET QUALIFIÉS EST EN CAUSE.
  1. Il n’y a pas abandon du pouvoir, ni remise en cause mais au contraire identification précise des pouvoirs nécessaires (rôles = pouvoir reconnu et attribué de faire) et allocation claire de chacun d’eux à qui en fera le meilleur usage. D’ailleurs la meilleure preuve en est le nom même de cette démarche qui contient le « cratie » (qui signifie « justement «  pouvoir »)
  2. Pas de remise en cause du pouvoir. Mais chasse au pouvoir arbitraire non défini ni attribué clairement en fonction du rôle qui est attribué. Chasse au pouvoir qui n’est pas le moyen d’un rôle, et qui n’est que pouvoir de coercition,
  3. Pas d’absence de manager mais au contraire le rôle du manager est magnifié en le déchargeant de tout arbitraire d’un pouvoir mal défini et non basé sur un rôle. Le rôle du « Premier lien » qui est l’expression la plus pure de ce qu’est (ou devrait être) un manager et le pilotage qu’il exerce de son « Cercle » constitué de l’ensemble des rôles qui en relèvent est l’essence même du management.
  4. Pas d’opposition systématique à une structure pyramidale. SI celle-ci est nécessaire dans certains cas, le rôle de pilote de la pyramide est posé, défini et attribué.
  5. Pas de liberté …libertaire mais responsabilisation saine et entière sur le rôle qui est attribué à la personne avec son accord et au mieux de sa motivation.
  6. Et pour finir, pas de condamnation de la vision et à la stratégie à long terme. Leur élaboration et leur mise en œuvre passent par des rôles très précis que la démarche se doit de définir et d’attribuer précisément.
UNE QUESTION SUR L’APPELLATION MÊME DE LA DÉMARCHE.
  1. Il est étonnant de devoir appeler cette organisation par un terme. Parle-t-on de « Pyramidalocratie ? »
  2. Une entreprise se définit-elle par son mode d’organisation et de fonctionnement  ou par la façon dont elle tient sa promesse de produit ou de service au marché ?
  3. Et à moins de vouloir faire de l’Holacratie un système de certification à l’exemple du système de qualification de la démarche Qualité (Iso), il y a plus à gagner à mettre en œuvre les bons principes de la démarche (qui ne sont jamais que ceux d’un management de qualité) qu’à communiquer en faisant peur sur cette démarche.

Pour ma part, je me réjouis de ce qu’une telle approche valorise : un saine réflexion sur ce qui est nécessaire et efficace à la production et à la délivrance du produit et du service promis au marché et une préoccupation d’évolution et d’adaptation permanente en tenant compte humblement et pragmatiquement des signaux envoyés par les tensions captées. Des tensions acceptées comme devant être traitées tout simplement sans mise en cause prioritaire des personnes.

Un grand merci à Isabelle Duchemin du cabinet ID STRATEGIE & ORGANISATION (iDSO), Jean-Michel Gode  du cabinet Insider et Romain Bisseret  Expert GTD, avec qui j’ai pu échanger précisément et positivement sur ces sujets dans le cadre d’une série d’évènements organisés par iDSO sur les pratiques innovantes en organisation et management.

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Vous avez dit « Agile » ? Oui, mais fondamentalement !

L’éco agilité de l’entreprise.

Les entreprises sont sommées de devenir agiles au risque sinon de … mourir !!! Voilà une sommation qui ne manquera pas de galvaniser et de mobiliser les équipes ! « Tous, direction de la salle de gym, en petites foulées ! » Je ne sais pas vous, mais moi, face à un tel commandement, j’ai tendance à me faire oublier au dernier rang de la file et de profiter du premier buisson pour m’éclipser et m’exempter du cours de gym qui me rappelle trop mes classes à l’armée du temps du service militaire OBLIGATOIRE.

Toutefois cette incantation trouve tout son son sens et son profit lorsqu’elle s’exerce dans le cadre des fondamentaux de l’entreprise et qu’elle permet d’y porter à leur plein potentiel les capacités correspondant à ces fondamentaux. Plutôt que de parler d' »entreprise agile », dont nulle définition précise n’est aujourd’hui posée, je préfère, pour ma part, parler d' »entreprise éco-agile » : une entreprise qui prend en compte et qui prend soin de l’éco système nécessaire à la réussite de son projet et qui met en œuvre avec intelligence et agilité les 7 capacités nécessaires aux fondamentaux de l’entrepreneuriat.

Toute entreprise du simple fait qu’elle existe est agile.

Elle prouve son agilité du simple fait qu’elle a su trouver des clients qui lui permettent d’exister et des ressources (hommes et matières) pour produire ces produits et services.

Organisme vivant elle survie, vie, se développe par son agilité à inventer des produis et services qui rencontrent la demande solvable du marché, par son agilité à attirer et fidéliser des employés et à savoir modifier son offre et ses modes de management en fonction des évolutions du marché et de la société.

Agiles, toutes les entreprises le sont, mais elles le sont plus ou moins.

Chacune a à veiller à parfaire et entretenir son agilité sur la base d’un état de santé non conciliant et régulier lui permettant, comme un sportif, d’adopter le régime qui lui conviendra le mieux en fonction de son projet et de la performance visée.

L’entreprise doit travailler ses fondamentaux (les fondamentaux de l’entrepreneuriat) dans l’état d’esprit adapté à l’actualité de la Société au sens large.

Elle doit le faire, dans un état d’esprit et selon des modalités les plus en phase avec les attentes et besoins de la situation actuelle en adaptant ses modes d’organisation et de fonctionnement.

Les évolutions fortes qui touchent nombre des composantes de l’écosystème de l’entreprise nécessitent dans le respect des fondamentaux de l’entreprise d’adapter régulièrement les modalités de création de valeur et du fonctionnement de l’entreprise.

Face à l’inadaptation de méthodes héritées d’un monde ancien, les entreprises sont dans l’obligation de se réinventer en tout ou partie. Elles sont en recherche de nouvelles approches génératrices d’innovation sous tous ses aspects (innovation produit, innovation managériale, innovation de production, …)

Les démarches agiles, héritières des démarches mises au point pour faciliter le développement d’applications informatiques sont nées de ce besoin.

Ces approches ont été développées, pour répondre à des besoins des projets informatiques à partir de 2001 par les développeurs informatiques. Elles ont progressivement gagné les autres fonctions de l’entreprise et se veulent une alternative au management traditionnel.

Alors même que le mot est sur toutes les lèvres et fait la une des revues de management, il n’existe aucune définition précise et normée de ce que serait une entreprise agile. Et pour cause. L’agilité est avant tout un état d’esprit.

L’Agilité, telle qu’elle est marketée, vise à améliorer le time to market, la réduction des coûts, la satisfaction client, l’engagement des collaborateurs et et, in fine, la rentabilité.

Mais n’est-ce pas là le propre de toute entreprise et l’effort de tout entrepreneur, de sa stratégie, de l’organisation et du fonctionnement de l’entreprise qui sont les bases bien comprises de l’entrepreneuriat ?

Aussi, est-il important de 1) rappeler simplement les fondamentaux de l’entreprise qui portent en eux tous les éléments de l’agilité afin 2) de permettre de mieux situer les caractéristiques de l’esprit agile qui aujourd’hui met l’accent sur certaines capacités et un centrage au final fondamental sur l‘humain.

Loin d’être une méthode, l’agilité est avant tout un état d’esprit qui touche au fond de la culture et les valeurs de l’entreprise et de ses équipes et les transforme.

Elle pose la norme du travail collaboratif et met fin au rapport individuel au travail.

Elle repose sur trois piliers : la collaboration, la réactivité, la flexibilité.

L’entreprise agile se centre sur l’humain et sa richesse.

C’est sans doute, là, si l’on recherche, faute d’une définition de ce qu’est une entreprise agile, SA caractéristique essentielle. Elle est centrée sur l’humain. Elle est « Human centric » et l’humain est son pivot. Ce qui est tout à fait normal puisqu’une entreprise est un système et que, tant dans son système interne que dans son interaction avec son éco système, elle interconnecte des acteurs.

Elle mobilise les leviers de l’engagement de l’ensemble des acteurs de l’écosystème de l’entreprise (le sens, l’écoute-découverte des besoins et attentes, l’offre personnalisée, …).

Elle vise à générer, encourager, et développer et guider la créativité des individus au sein du collectif dans le cadre du sens du projet de l’entreprise.

Les démarches agiles sont l’émanation directe des approches du Lean startup, du Lean management et de l’efficacité opérationnelle.

Elle valorise une approche de développement incrémental par cycles courts, autour d’équipes pluridisciplinaires travaillant de façon synchronisée sur un même objectif.

A nouveau il n’y a rien là d’innovant, si ce n’est l’accent particulier mis sur la valorisation du cycle court. C’est là l’objet et la finalité de toute entreprise. Aussi l’agilité est la compréhension et la mise en œuvre des conditions de l’efficacité de l’entreprise et de ses fondamentaux.

L’on ne peut que s’en réjouir.

L’engouement actuel pour l’Agilité a au moins le grand mérite de (re)mettre en lumière certaines des modalités de la performance de l’entreprise.

Elle les actualise dans leurs modalités de mise en œuvre et les adaptent aux réalités d’aujourd’hui et aux attentes et besoins des acteurs de l’écosystème de l’entreprise.

Revoyons ces quelques fondamentaux et voyons comment l’état d’esprit Agile les reconfigurent et les adaptent aux réalités et exigences d’aujourd’hui.

Les fondamentaux de l’entrepreneuriat et de l’entreprise sont d’une extrême simplicité.

Ils tiennent au fait que l’entreprise est un organisme vivant et que comme telle elle est un système qui vit au sein d’un écosystème.

Un écosystème qui la nourrit et que l’entreprise a tout intérêt à nourrir en retour pour assurer sa propre survie et son développement.

En tant que système, dans la visée de la raison d’être et de sa stratégie, elle transforme, par son système de production des « inputs » en « outputs ».

Par des boucles de rétroaction, et au vu de ces « outputs » elle adapte, en tant que de besoin, ses objectifs, ses produits et services et ses modes de production et de services.

Cette adaptation se doit d’être permanente en fonction de l’évolution des attentes et besoins de chacune des parties prenantes de l’écosystème de l’entreprise. Des évolutions qui participent de grandes tendances qui pour certaines portent le projet de l’entreprise et pour d’autres le contrarient voir le condamnent à un terme plus ou moins proche si l’entreprise n’évolue pas.

L’importance fondamentale de prendre en compte l’ensemble de l’éco système de l’entreprise.

Les clients sont une des parties prenantes essentielles de l’écosystème (sans client l’entreprise n’existe pas ou meurt). Les démarches agiles mettent l’accent sur la satisfaction client.

Mais l’entreprise sera d’autant plus agile et performante qu’elle s’intéressera tout autant aux attentes et besoins de l’ensemble de ses parties prenantes. S’intéresser ne veut pas dire obligatoirement répondre à l’ensemble de ces besoins et attentes. L’entreprise isolera avec profit ceux de ces besoins qui une fois satisfaits contribueront à la réussite de son projet.

Elle s’offrira ainsi un éco système fortement contributeur à son développement et à sa réussite. Par la proximité et la collaboration ainsi entretenue avec l’ensemble de ses parties prenantes, elle captera de plus les signaux avancés des évolutions qu’il lui faudra intégrer soit pour en tirer profit soit pour s’en protéger et adapter en conséquence sa stratégie.

Les démarches agiles qui prônent comme norme le travail collaboratif ne font, mais cela est salutaire, que mettre en évidence l’importance de ce travail en réseau et de la dynamique systémique.

Dans cette visée, une communication de qualité est essentielle au sein de cet éco système. Aussi, Une entreprise agile s’appuie-t-elle sur les technologies de l’information et les puissantes ressources qu’elles offrent aujourd’hui pour connecter l’ensemble des acteurs tant au sein de son système interne que de son écosystème au sens large.

L’importance du sens de l’action collective.

Cette collaboration aura d’autant plus de valeur pour l’entreprise que les acteurs associés connaitront précisément et simplement la raison d’être et la vision de l’entreprise et du projet auxquels il leur est demandé de contribuer.

Ce sens donné par la raison d’être est essentiel tant à la motivation qu’à l’autonomie des collaborateurs de l’entreprise qui au plus proche du terrain sont alors les mieux placés pour décider de l’action efficace à mener.

Ce sens prend de plus en plus d’importance et s’étend au-delà du périmètre traditionnel de l’entreprise.

L’importance prise aujourd’hui par le rôle sociétal, social et environnemental de l’entreprise avec la RSE, la loi PACTE, l’entreprise à mission, est là pour le rappeler.

Mais là encore, prenons garde de raison garder, en ne voulant pas faire porter à la « raison d’être » de l’entreprise autre chose que ce qu’elle signifie : tout simplement mais fondamentalement sa raison d’exister qui ne peut être autre chose que la valeur qu’elle apporte à des clients qui reconnaissant cette valeur sont prêt à lui acheter ses produits et services.

Ces fondamentaux, pour être mis en œuvre de manière optimale, nécessitent de la part de l’entreprise 7 agilités, 7 capacités fondamentales :

1. Capacité de détection et de veille des tendances. 2. Capacité à donner du sens à son action, 3. Capacité stratégique, 4. Capacité opérationnelle, 5. Capacité de pilotage, 6. Capacité de rétroaction et de feedback, 7. Capacité écosystémique.

L’Agilité prônée et marketée depuis ces dernière année n’a de valeur qu’en convoquant ces capacités fondamentales et en précisant leurs modalités d’application aux besoins et attentes d’aujourd’hui des acteurs de l’écosystème d’une entreprise.

De l’importance de s’intéresser à l’ensemble des parties prenantes.

Les clients sont une des parties prenantes essentielles de l’écosystème (sans client l’entreprise n’existe pas ou meurt). Les démarches agiles mettent l’accent sur la satisfaction client. Mais l’entreprise sera d’autant plus agile et performante qu’elle s’intéressera tout autant aux attentes et besoins de l’ensemble de ses parties prenantes.

Elle s’offrira ainsi un éco système fortement contributeur à son développement et à la réussite de son projet. Par la proximité et la collaboration ainsi entretenue avec l’ensemble de ses parties prenantes, elle captera de plus les signaux avancés des évolutions qu’il lui faudra intégrer soit pour en tirer profit soit pour s’en protéger et adapter en conséquence sa stratégie.

Les démarches agiles qui prônent comme norme le travail collaboratif ne font, mais cela est salutaire, que mettre en évidence l’importance de ce travail en réseau et de la dynamique systémique.

L’Agilité n’est pas une méthode, c’est un état d’esprit qui touche aux valeurs et à la culture d’entreprise.

Elle impacte, en toute cohérence, l’ensemble du fonctionnement de l’entreprise à commencer par le rôle et la mission du management. Le manager porté par cet esprit devient un manager « jardinier » qui a pour mission de déceler et d’entretenir et développer les potentiels et la contribution de ses équipes.

Une entreprise agile s’appuie fortement sur les méthodes et technologies de communication et d’information. Elle tire parti pleinement des puissantes ressources que ces méthodes et technologies offrent aujourd’hui pour connecter l’ensemble des acteurs tant au sein de son système interne que de son écosystème au sens large.

Il y est autant question de communication non violente, de technique d’intelligence collective, de prise en compte des émotions et de la créativité que de logiciels de communication numérique de toutes sortes.

Attention à ne pas trahir l’esprit de l’Agilité.

Ce n’est pas une Doxa qui imposerait ses méthodes à tous et partout.

Sa finalité est d’adapter en permanence le système de l’entreprise aux besoins et attentes changeantes de son écosystème. L’entreprise réellement agile saura identifier en permanence là et comment il lui est spécifiquement nécessaire de s’adapter à ces évolutions pour la réussite de son projet dans le cadre de sa raison d’être.

C’est donc à chaque entreprise d’identifier les besoins d’évolution des fondamentaux de son projet d’entreprise et de les mettre en œuvre.

Ces besoins d’évolution peuvent, au cas le cas, concerner et sans exclusive sa veille, sa vision et sa raison d’être, sa stratégie, son système de production, le pilotage de sa performance, sa capacité d’autoanalyse et de feedback, son écosystème).

Sur la base de ces besoins qui lui sont propres elle a à définir et progressivement faire évoluer son projet, son offre, son business modèle, ses modes de production et de fonctionnement.

 

En ne cherchant pas absolument à être à la dernière mode, l’entreprise s’assurera ainsi  de trouver le costume qui lui convient, qu’elle se sera taillé sur mesure et où elle sera à l’aise. Un costume dans lequel, confortable, assurée et ouverte à l’échange, elle agira en toute agilité. 

 

 

 

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Oh Mon God ! J’hallucinize !!!

Je découvre avec consternation cette nouvelle marque, estampillée « La Poste » dans un bureau de poste d’une sous préfecture bien française.

Suis-je plus consterné pour la langue française que compatissant pour la langue anglaise ? J’en arrive à douter. En fait, je suis à la fois consterné et compatissant. Ma compassion s’aggrave quand j’y ajoute celle que j’éprouve pour les équipes de la Banque Postale. Je souffre pour ces postiers et postières contraints d’arborer un énorme médaillon (d’aucun dirait « badge ») estampillé à la marque. Ils doivent se sentir bien modernes et tendances, à moins qu’ils ne se sentent, au contraire, bien ridicules.

La loi est sauve mais pas la langue.

Il est plus que probable que, avant de valider cette campagne, les services juridiques de la Poste ont été mis à contribution. Ces services ont bien fait leur travail. Ils se sont assurés de mettre cette campagne à l’abri des attaques de grincheux rétrogrades, tels que moi.

En effet la loi Toubon de 1994 exonère les noms de marques de l’obligation d’utiliser la langue française ou de faire figurer leur traduction dans les communications. Donc autant les communiquants que les juristes ont pu rassurer leur Comité de Direction : « Ma Frenck Bank » est un nom de marque. Donc « No Problem. Let’s go« .

J’ai mal au Comité de direction qui a validé cette marque et sa communication.

J’imagine la séance du Comité de Direction à qui le dossier a été présenté par une joyeuse bande de marketeurs avec l’aide de créatifs mercenaires. Je vois défiler les Powerpoint retraçant études de marché et statistiques prouvant l’appétit des masses pour ce type de communication. J’imagine les « Executive summaries » (Sic) garantissant la pertinence, l’ »incontournabilité » et la réussite d’une telle campagne.

J’imagine, les affres de celui ou de celle, s’il y en eut, dans ce comité, qui aurait voulu en douter et le faire savoir. Il y faut du courage pour oser aller à contre-courant du « main stream » (Sic et branché), au risque de passer pour ringard et passéiste (on dit « has been »), ou déficient en anglais. J’imagine celui ou celle qui aurait osé s’étonner du libellé de la marque et du texte de présentation s’entendre répondre : « Non, allez-y sans crainte, vous ne risquez rien, cher Comité de direction. Allez-y valider, et en plus ça vous donnera un petit air jeunes et sexy ! »

J’ai mal aux postiers et postières qui doivent incarner cette marque.

Le fascicule présentant la marque, les désigne sous le nom de « French conseillers* » (Sic). Le (*) renvoie, en bas de page, non à une traduction mais à l’explication suivante « (*) Conseillers Ma French Bank« .

Apriori, « French conseillers » n’est pas une marque déposée. J’en viens à conclure logiquement que le (*) renvoie bien, dans le respect de la loi, à ce qui normalement devrait être une traduction en bon français. J’en conclue donc que  » French conseillers » se traduit en français par  » Conseillers Ma French Bank« . C’est à y perdre son latin !

Mais la brochure se veut rassurante.  » Le service client Ma French Bank, ce sont des humains, qui me répondent ..et qui sont dispo en même temps que moi » (Sick, serais-je tenté d’ajouter, en bon anglais, tant un tel texte me donne la nausée.)

Vous voilà rassurés Mesdames et Messieurs les postiers vous êtes bien des « humains » et en plus vous êtes « dispo » en plus d’être « French ».

Cela vous pose son postier ou sa postière de se savoir « French conseillers« . Cela doit rassurer tous ceux qui douteraient de leur nationalité. Il est vrai qu’à perdre sa langue, on peut arriver à douter.

Mais pas de crainte, même à l’étranger, « Voyagez à la French*, … » (Re Sic) (* A la française) (Sic et re Sick) comme nous y invite le fascicule. De même, pas d’inquiétude, Ma French Bank, avec « Wepartage » et avec « Let’s Cagnotte » pourvoit à toutes nos envies.

Là, plus de doute. Sachant que je ne peux douter que La Poste dispose des meilleurs communiquants. Tout bon communiquant sait que le message doit être précisément calibré en fonction de la cible à laquelle le message est destiné. Aussi, le diagnostic est facile à poser. Il est clair : La Poste a définitivement fait le choix d’avoir des clients analphabètes, un rien abrutis et définitivement …. modernes.

Pour la défense de la langue anglaise.

Puisqu’il est désormais prouvé que l’on peut impunément contrevenir en permanence à la loi, en en détournant l’esprit, et piétiner la langue française en la maquillant en pseudo anglais, je voudrais au moins défendre la langue anglaise. A défaut de parler Français, respectons au moins la langue anglaise sans se tourner en ridicule aux yeux du monde entier … qui lui parle anglais mieux que nous parlons français à force de massacrer notre langue.

Une langue schizophrénique.

J’ai eu une réelle difficulté à prononcer « Ma French Bank » lorsque j’ai demandé le prospectus de présentation dans ce bureau de poste. A en juger par cette difficulté, je me rends compte de la schizophrénie dans laquelle ces libertés de langage nous enferment. Essayez vous mêmes de prononcer « Ma French Bank« . Ressentez la tension de votre esprit obligé, avec effort, dès le second mot de « twister » du Français à l’Anglais.

Une langue qui en est réellement une est le vecteur d’un mode de pensée. Faire ainsi, dans la même phrase, se percuter deux mondes et deux représentations, ne peut manquer de produire ce mal de tête quasi existentiel. Sauf évidement pour qui les mots n’ont pas de sens. Ceux pour qui les mots ne sont que des noms de marques. Des mots qui ne sont plus porteurs de sens mais vecteurs de marques, voilà une belle promesse d’abêtissement.

J’entends déjà les remarques des pourfendeurs de la langue française.

« Dépassé« , « Has been« . « Il faut vivre avec son temps« , « Grincheux« . Mais lorsque les mots ne sont plus porteurs de sens, il y a lieu de s’inquiéter grave. Le grave » c’est pour faire jeune … et Français. Et je n’aurai qu’un mot pour conclure et dans le souci de préserver et rendre hommage tant à la langue française qu’à la langue anglaise et à l’histoire (celle du temps où le français était la langue officielle à la cour d’Angleterre) :

HONNI SOIT QUI MAL Y PARLE !

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Evaluez et renforcer votre présence au monde et aux autres.

Il n’est pas de stratégie sans une claire affirmation ni une claire acceptation de qui nous sommes et de qui sont ceux qui constituent nos socio et écosystèmes.

A bien y regarder c’est là le point de départ de toute stratégie.

1. Evaluez, grâce au quiz ci-dessous, la force de votre présence à vous-mêmes et aux autres.

 

2. Visualisez clairement votre positionnement et définissez vos objectifs d’évolution en chargeant l’application gratuite.

Au delà de ce quiz et pour aller plus loin, RéSolutions a développé une application vous permettant de visualiser clairement votre positionnement détaillé sur 32 composantes et de vous fixer vos propres voies d’évolution.

Vous pouvez la charger gratuitement
en cliquant ci-après.

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