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L’improvisation : l’art de la vie.

Un concert mythique, une leçon d’improvisation

Le 24 janvier 1975, Keith Jarrett donnait un concert à l’Opéra de Cologne. Ce moment unique de 66 minutes d’improvisation est considéré comme la « Joconde du Jazz ». Redécouvert grâce à l’émission On ne s’improvise pas improvisateur animée par Adèle Van Reeth sur France Culture, ce concert devient prétexte à une méditation profonde : l’improvisation est-elle pure inspiration ou le fruit d’un long entraînement ? Et plus fondamentalement, notre vie n’est-elle pas qu’une permanente improvisation ?

Improviser : don ou discipline ?

Keith Jarrett lui-même pose la question : improvise-t-il « à partir de rien » ou à partir d’un « plein » construit au fil du temps ? Ce rien, loin d’être un vide, serait plutôt une richesse enfouie qui surgit. L’improvisation apparaît alors non comme une illumination divine, mais comme une compétence façonnée, enracinée dans l’habitude et la pratique.

L’art de transformer l’accident en opportunité

Improviser, c’est être capable de capter les signaux de l’environnement et d’en faire quelque chose. Jarrett ouvre son concert par les notes « Sol Ré Do La », écho direct à la sonnerie de l’opéra. C’est ce que les anthropologues appellent « affordance » : la capacité d’agir en s’appuyant sur les opportunités imprévues. L’improvisation, c’est cette manière de composer avec le monde tel qu’il se présente.

Routines créatives : la force invisible du geste

Loin d’être un art du vide, improviser, c’est mobiliser un répertoire de gestes appris, répétés, incorporés. Ce sont ces gestes, transformés en réflexes, qui permettent l’adaptation rapide et la création vive. C’est aussi valable dans la vie quotidienne que dans la musique : nous improvisons tous, à chaque instant.

Fabriquer plutôt que consommer

Jarrett évoque cette image : se faire à manger avec ce qu’on trouve dans le frigo, plutôt que de commander une pizza. Penser, créer, jouer : tout cela demande de partir de ce que l’on a appris et gardé en soi, plutôt que d’imiter des recettes toutes faites.

Improviser, c’est être vivant

L’improvisation est moins un saut dans l’inconnu qu’une réponse inventive à ce qui nous entoure. C’est un art profondément humain, une intelligence du présent nourrie par le passé. Et si, au lieu de chercher à tout planifier, nous apprenions à mieux écouter, observer, et faire avec ce que la vie nous offre ?

Que faisons-nous de ce qu’il y a dans notre frigo intérieur ?

Explorons, jouons, improvisons — la vie est un concert à inventer à chaque instant. Mais n’oublions pas de remplir notre frigo de nos propres emplettes.

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ICARE : Le levier culturel de Michelin pour grandir ensemble dans un monde en transformation.

Une vision RH en rupture avec le passé

Dans un épisode du podcast Growth Strong Leader animé par Meredith Bell, Marie-France Lechasseur, Human Resources Business Partner & Competency Director chez Michelin , partage une vision inspirante de la transformation culturelle profonde que vit l’entreprise grâce au modèle ICARE lancé il y a maintenant 4 ans. Cet acronyme, qui signifie I pour Inspiring, C pour Créer la confiance, A pour Awareness (conscience de soi et des autres), R pour Résultats et E pour Empowerment, est bien plus qu’une simple méthode managériale : il incarne une révolution silencieuse du leadership et de la culture interne chez Michelin.

D’un management vertical à une culture de l’autonomie

Lle modèle ICARE traduit une volonté claire de rompre avec un management historiquement top-down, souvent hérité d’une culture quasi militaire, pour s’engager dans une dynamique d’ouverture, de responsabilisation et d’écoute. Ce changement implique une remise en question profonde des postures traditionnelles des managers. Il leur est désormais demandé de créer un climat de confiance propice à la prise d’initiative, à l’autonomie et à l’expression des potentiels individuels. Il ne s’agit plus d’exécuter mais de co-construire.

Recrutement : un dialogue de confiance dès l’entretien

Marie-France Lechasseur souligne que ce changement de paradigme ne se limite pas aux relations internes entre collaborateurs. Il s’applique tout autant aux processus de recrutement, devenus de véritables moments de dialogue. Désormais, un(e) candidat(e) peut — et doit — poser des questions telles que : Comment allez-vous me faire confiance ? Comment allez-vous m’aider à grandir ? Poser ces questions traduit une évolution majeure : le modèle ICARE rend légitime l’attente d’un environnement qui soutient et développe les talents. L’empowerment devient une exigence culturelle, non un privilège.

Des clés pour réussir l’intégration culturelle des acquisitions

Cette évolution de culture a aussi prouvé toute sa pertinence lors des nombreuses acquisitions opérées par Michelin, souvent dans des secteurs très différents. Pour Marie-France Lechasseur, cette démarche d’ouverture, d’écoute et de mise en confiance est essentielle pour réussir l’intégration de ces nouvelles entités. Elle parle d’une « courbe d’apprentissage réciproque » : là où une culture ancienne aurait imposé ses règles, ICARE favorise la rencontre, l’alignement et la cohabitation des différences. La clé de cette réussite : la capacité à mettre son ego de côté pour créer des ponts plutôt que des murs.

L’expérience marketing au service des RH

Ce regard renouvelé sur l’humain et les dynamiques collectives s’appuient aussi sur l’expérience marketing de Marie-France Lechasseur. Elle y puise sa conviction que la culture d’entreprise est une promesse à tenir, pas un message à vendre. Elle transpose aujourd’hui cette logique dans les RH : comprendre les besoins profonds des collaborateurs comme on comprend ceux des clients, offrir une expérience employé cohérente et sincère, et cultiver une marque employeur alignée avec les pratiques réelles.

Une culture vivante et incarnée

Mais attention : ICARE ne peut en aucun cas devenir un simple slogan d’entreprise. Pour que cette transformation culturelle s’ancre durablement, elle doit être incarnée à tous les niveaux et soutenue par des moyens concrets : formation, feedback, accompagnement, dialogue constant. Chacun doit être invité à prendre conscience de ses propres forces, à remettre en question ses habitudes, et à accéder à des outils lui permettant d’évoluer, personnellement et collectivement. ICARE n’est pas un but, c’est un chemin : celui d’une entreprise qui choisit de grandir avec ses collaborateurs pour affronter, ensemble, la complexité du monde.


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Devenir acteur de son propre sens.

Nous avons tous (jeunes ou moins jeunes, diplômés ou non) besoin de repères pour avancer. Les six conseils que Philippe Silberzahnadresse aux jeunes diplômés, dans un monde incertain s’ont précieux et valent plus largement. Mais, selon moi, il en manque un, fondamental qui en est le véritable préalable.

Commencer par soi : se connaître avec humilité et … ambition.

Avant tout, il est essentiel d’apprendre à se connaître avec humilité, réalisme… et ambition. Cette ambition n’est pas celle de réussir à tout prix, mais de savoir à quoi l’on veut contribuer, quel impact on souhaite avoir.

Par ambition j’entends celle de savoir à quoi et comment ce jeune (ou ce moins jeune) à envie de contribuer c’est-à-dire tout simplement et au sens propre du terme apporter son tribu à l’œuvre commune.  Voilà un conseil qui sent son patronage mais qui selon moi est essentiel à qui réclame à corps et à cri de trouver du sens

Donner plutôt que réclamer

Trop souvent, nous attendons de la société ou de notre entreprise qu’elle nous donne du sens. Or, ce sens ne se reçoit pas : il se construit, par notre propre engagement.

Donnons-nous l’effort de le chercher nous-même et non d’attendre en revendiquant qu’on nous le donne au risque sinon immanquablement de récriminer contre cette Société qui décidément ne nous le donne pas. Or ce sens c’est à chacun de nous de trouver le bon, celui qui nous convient non en pur consommateur mais bien en contributeur.

Passer du consommateur au contributeur

Cela suppose un changement de posture : ne plus être seulement celui qui attend et revendique, mais celui qui agit, propose, crée.

Une contribution qu’il nous revient de définir au mieux de nos appétences et compétences, en en acceptant les contraintes et les difficultés mais aussi en en recevant toute la gratification, celle d’exister (ex-ister : sortir de soi – en allant au devant des autres et des situations).

Cette contribution nous fait exister pleinement, dans la rencontre avec les autres et avec les situations.

Un conseil qui contient tous les autres

Ce travail sur soi et sur sa contribution est la clé qui donne toute sa portée aux six conseils de Philippe Silberzahn.

C’est à la lumière de ce premier conseil qu’ils trouvent toute leur résonnance et légitimité. A tel point que je veux y voir le seul que je donnerai à quiconque car il en rend possible l’effet en les contenant tous les six. Et cela pour des jeunes et des moins jeunes, qu’ils soient ou non diplômés.


Trouver du sens c’est agir

Si vous cherchez du sens, ne commencez pas par poser des questions aux autres, commencez par vous en poser à vous-même. Quelle est votre contribution ? Quelle œuvre commune avez-vous envie de rejoindre ? C’est à cette condition que les conseils deviennent moteurs. Alors : osez vous définir, osez contribuer.

Un grand merci à Philippe Silberzahnpour ce texte qui, comme bien souvent, nous encourage à aller plus loin dans notre propre réflexion.

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La Contribution, l’Assurance Vie de la Stratégie.

La stratégie ne vaut que par son exécution

Toute stratégie, tout aussi pertinente qu’elle soit pour adresser les ambitions et les réalités de l’entreprise et de son marché, ne se jugera qu’en fonction de la réalité de son déploiement.

Le Hoshin Kanri : une méthode d’alignement éprouvée

Gilles Ruffieux dans son post « From Abition to Result, at speed » nous rappelle les vertus prouvées du Hoshin Kanri (en japonais : déploiement de la stratégie), une méthode de management stratégique développée par Toyota. Elle vise à aligner les objectifs stratégiques d’une entreprise avec ses activités opérationnelles, en impliquant tous les niveaux hiérarchiques et en traduisant la vision stratégique en objectifs concrets pour chacun de ces niveaux.

Les conditions clés de réussite

Rappelons-en avec Gilles Ruffieux à la fois l’efficacité mais également les exigeantes conditions de sa réussite : une vision stratégique claire, une culture d’amélioration continue, un engagement fort du management, une volonté d’alignement transversal et l’absence de silos.

Une mise en œuvre exigeante mais bénéfique

Une efficacité obtenue au prix d’une mise en place qui peut être lourde et complexe, et comme telle exigeante en termes de temps, de formation et de pilotage.

La contribution comme moteur stratégique

Du commentaire de Gilles Ruffieux s Ruffieux et de la démarche de QiBud, qu’il a développée et qu’il déploie avec son équipe au sein de QIBud, le maître mot est : « La Contribution ». Et c’est la raison pour laquelle je ne manque jamais d’attirer l’attention sur leur approche.

Une approche incarnée : l’exemple de QiBud

Au cœur de la réussite de l’entreprise est – ou devrait être – la possibilité pour chacun des collaborateurs, quel que soit son niveau, de savoir en quoi l’action qu’il s’apprête à mener contribue à la stratégie de l’entreprise. Toute entreprise dont tant l’organisation que le fonctionnement et le système de management sont construits sur cette évidence et les rendent opérationnels, offre à sa vision une véritable assurance vie.

Pourquoi la contribution reste une évidence négligée

C’est bien l’ensemble du système de l’entreprise en lien avec son écosystème qui est concerné. En effet la question de la contribution se pose dans les mêmes termes pour la contribution de l’entreprise aux besoins et ambitions de chacune de ses principales parties prenante. Et cette évidence est également bien souvent oubliée à ce niveau.

Sortir du caporalisme et du silotage pour retrouver du sens

Il est étonnant de constater la difficulté de nombre de dirigeants à intégrer cette évidence. Faut-il y voir la difficulté de certains à s’ouvrir à la prise en compte de l’ensemble des niveaux de l’entreprise, tant verticaux qu’horizontaux, en luttant contre le caporalisme et le silotage ? À moins que cette difficulté ne résulte, dans bon nombre de cas, de l’absence de priorités stratégiques clairement définies, souvent tout simplement par manque de vision.

Redonner toute sa place à la contribution

QiBud, dont toute la logique est basée sur la contribution de chacun des acteurs de l’entreprise, rend cette contribution aisément et à tout moment visible et mesurable. Je rappelle que je n’ai aucun intérêt dans cette entreprise, dont je ne manque jamais de recommander la démarche et les outils – comme je le ferai avec plaisir pour toute autre offre contribuant à rendre évidente… cette évidence de la contribution.

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Du « Nudging » au « Boosting » Donner à chacun le pouvoir d’agir pour tous.

 

La pandémie de COVID-19 a rappelé avec force que notre capacité à relever les grands défis contemporains – santé publique, climat, démocratie – dépend de notre aptitude à changer les comportements à grande échelle. L’article « Moving from nudging to boosting: empowering behaviour change to address global challenges » propose une analyse critique du « nudging », approche dominante des politiques publiques comportementales, et plaide pour un changement de paradigme vers le « boosting », une stratégie d’autonomisation et de renforcement des capacités collectives.

Nudging : une ingénierie douce mais manipulatrice

Le « nudging » consiste à modifier subtilement l’environnement de décision pour inciter, sans contraindre, les individus à adopter des comportements jugés bénéfiques. Cette approche repose sur une vision « déficitaire » de l’humain : nos biais cognitifs, notre manque d’information ou de motivation nous conduiraient à faire de mauvais choix. Les nudges exploitent ces failles pour « guider » nos décisions, tout en « préservant » (?) notre liberté de choix.

Le succès du nudging s’explique par sa simplicité, son faible coût, et sa capacité à éviter les mesures plus impopulaires ou coûteuses (taxes, interdictions, campagnes massives). Il séduit aussi parce qu’il exonère les décideurs de s’attaquer aux causes systémiques des problèmes, en renvoyant la responsabilité sur les individus.

Les limites du modèle comme prothèse à nos déficiences individuelles

L’article souligne deux faiblesses majeures du nudging :

  • Une vision réductrice de l’humain : En insistant sur nos faiblesses, le nudging néglige nos capacités d’adaptation, de coopération et d’apprentissage. Il s’appuie sur une interprétation pessimiste de la « rationalité limitée » chère à Herbert Simon, réduite à une accumulation de biais plutôt qu’à une intelligence adaptative.

  • Un focus excessif sur l’individu : Les politiques de nudging ignorent la puissance du collectif. Or, la crise du COVID-19 a montré que l’adhésion durable aux mesures sanitaires reposait moins sur la manipulation subtile des choix individuels que sur le sentiment d’appartenance à une communauté, la solidarité et la mobilisation d’une identité partagée.

Boosting : vers l’autonomisation et la capacité collective

Face à ces limites, les auteurs défendent le « boosting » : une approche qui vise à renforcer les compétences, les connaissances et la motivation des individus pour leur permettre d’agir de façon autonome et collective. Il ne s’agit plus de « corriger » des déficits, mais de développer les ressources nécessaires pour faire face à la complexité du monde.

Le boosting valorise la formation, l’éducation, la co-construction de solutions, la confiance dans la capacité des groupes à s’auto-organiser et à innover. Il invite à investir dans l’intelligence collective, à créer des environnements propices à la coopération et à l’expérimentation.

Des questions critiques soulevées à la lecture de cet article

La lecture ce cet ’article invite à s’interroger :

  • Le nudging est-il toujours inutile ? Dans certaines situations d’urgence ou pour des publics vulnérables, des nudges bien conçus ne peuvent-ils pas jouer un rôle utile, en complément d’autres stratégies ?

  • Comment éviter que le boosting ne profite qu’aux plus favorisés ? La montée en compétences suppose un accès équitable à l’éducation, à l’information et à la participation.

  • Les décideurs sont-ils prêts à renoncer à la facilité du nudging ? Le boosting suppose un engagement plus profond, une volonté de transformer les structures et de partager le pouvoir d’agir.

Un nudging pour dirigeants ?

Et c’est, selon moi, bien dans cette dernière question que réside toute la difficulté qui est à surmonter. Avec cette épineuse question pour laquelle je n’ai toujours pas de réponse sur le comment y parvenir. Et si j’essayais le nudging pour dirigeants ? 😊)

« Moving from nudging to boosting: empowering behaviour change to address global challenges » Ralph Hertwig , Susan Michie, Robert West and Stephen Reicher, Cambridge University Press, Behvavoural Public Policy (2025) 1-12

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Révolutionner le management : de la production à la « com-préhension » des idées.

Transition vers une épistémologie de la réception … et de la compréhension

Je partage les propos d’Ibrahima Fall, dans son article « La loi du tonneau percé » que résument bien ses dernières lignes: « il est temps de passer, en ce qui concerne le «management, d’une « épistémologie de la production » à une « épistémologie de la réception » car « les bonnes idées sont sans valeur, ce qui compte, c’est celui qui les a » (Kraus).. »

Intégration et compréhension des idées

J’ajouterai (mais n’est-ce pas ce qu’entend Ibrahima Fall ?) … c’est celui qui les intègre, les « comprend » au sens propre du terme c’est-à-dire les « prend » « avec » soi.

Appropriation des vérités par le plus grand nombre

Toute la question, comme nous en avons débattu récemment, est pour moi dans l’appropriation par le plus grand nombre de ces « vérités » portées par ce corpus de connaissances. D’autant qu’à bien y regarder elles tiennent en un nombre (très limité) de préceptes reformulés de générations en générations depuis l’antiquité.

Préceptes et principes

Faisons que ces préceptes (qui sont avant tout des règles pratiques ou des conseils moraux) soient la traduction de principes qui expriment des vérités fondamentales ou des lois générales.

Partage des principes vs Apprentissage des préceptes

L’effort me paraît être moins dans l’apprentissage de l’application de ces préceptes (ce qui se traduit par l’appétit de solutions toutes faites et la promotion de méthodes et d’outils enseignés dans nos écoles notamment de commerce) que dans le partage de ces principes. Un partage par celles et ceux qui sont soumis à ce corpus et qui en ressortent transformés par un élargissement de leurs façons de voir par la « com-préhension » de ces savoirs.

Enrichissement culturel des façons de voir

Nous partageons donc l’accent et la priorité qui doivent être mis sur le nécessaire enrichissement des façons de voir par l’intégration réelle des fondamentaux de ce corpus, construction de cette infrastructure morale et culturelle qu’Ibrahima Fall appelle inlassablement de ses vœux. Des vœux auxquels il s’emploie activement, entre autres par l’action de l’Institut du Travail Réel.

Le corpus est là, tout l’effort est de le donner à voir pour que le plus grand nombre l' »incorpore » et se l’approprie.

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Les futurs du travail : Quel scénario pour demain ?

J’ai hâte de lire dans 10 ans la réalité du moment et les projections qui seront alors faites sur l’avenir du travail ! Il me parait que pour nous faire une idée des chances (au sens probabilité du terme) de chacun des quatre scénarios que nous propose Gilles Favro, dans son article « Quatre scénarios pour le futur (ou la disparition) du travail. »il est indispensable d’identifier le moteur du changement à l’œuvre dans la réalisation de chacun d’eux.

Analyse des Scénarios

Par exemple, mais de manière trop rapide et qui nécessiterait une analyse évidemment plus approfondie :

Scénario 4 : Remise en cause des modèles de (re)distribution

Le scénario 4 ne peut survenir qu’à la faveur d’une remise en cause complète (et donc selon moi bien improbable) de nos modèles actuels de (re)distribution. Si par exemple, des initiatives comme le revenu universel ou des politiques de redistribution plus équitables pourraient être des catalyseurs de ce changement je ne vois pas actuellement le ferment qui permettrait de leur donner droit de cité.

Scénario 3 : Remise en cause du progrès technologique

Le scénario 3 remet en cause le moteur même du développement de nos sociétés occidentales et qui entraine toutes les autres sociétés dans son sillage, celui du dit « progrès » technologique. Une remise en cause d’autant plus improbable que ce moteur est au cœur de notre système dont l’« essence » est technologique. Seul un effondrement préalable de tout notre système actuel me parait pouvoir et devoir nous y contraindre. Faut-il le souhaiter ? Il est crucial de réfléchir aux alternatives possibles et aux conséquences d’un tel bouleversement. Mais ne sommes-nous pas prisonniers de ce système comme Jacques Ellul nous en alertait en 1977 dans son maître ouvrage « le Système technicien ». Rappelons le rapport Meadows du MIT (Halte à la croissance) date de la même année et qu’il n’a pas plus été entendu à l’époque… ni réellement encore aujourd’hui 48 ans après.

Scénario 2 : Stagnation de la productivité et inégalités

Le scénario 2 ne me parait pas si éloigné de la réalité actuelle puisque la productivité de nos économies a cessé de croitre au rythme des investissements technologiques depuis déjà de nombreuses années alors même que dans le même temps les plateformes numériques déréglementent le marché du travail et que l’ubérisation du travail ne fait que contribuer à l’accroissement des inégalités. Des exemples concrets incluent la gig economy et l’impact des plateformes comme Uber ou Deliveroo sur les conditions de travail.

Scénario 1 : Continuité du système technique et social

Enfin le scénario 1 dans les circonstances actuelles est celui qui me parait le plus porté par le moteur de notre système technique et social actuel. Les exemples ne manquent pas d’entreprises qui investissent massivement dans l’innovation technologique tout en maintenant des structures sociales existantes.

Ces scénarios sont à écrire et surtout à agir. Selon la formule utilisée sur les plateaux de tournage où les scénarios deviennent réalité ; « Action ! »

Il est essentiel de continuer à explorer ces scénarios et d’encourager le débat public et la réflexion collective. Chacun de nous a un rôle à jouer dans la construction de l’avenir du travail. Engageons-nous dès aujourd’hui à imaginer et à construire un futur plus juste, durable et pour reprendre la formule d’Olivier Hamant « robuste ». Partageons nos idées et contribuons à cette réflexion en commentant et en partageant cet article. Ensemble, choisissons le rôle que nous voulons jouer dans ce futur.

Un grand merci à Gille Favro pour son article dont ces lignes sont le prolongement comme l’occasion de pousser plus avant ma propre réflexion.

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Le diplôme : entre signal, garantie et fiction collective ? Une réflexion qui interpelle.

 

L’article de Marie Duru-Bellat partagé par Sylvie Giraud interroge en profondeur la place et la valeur réelle du diplôme dans notre société. Il mérite toute notre attention – non seulement pour comprendre le monde du travail d’aujourd’hui, mais aussi pour repenser nos critères de recrutement, de reconnaissance et de transformation des compétences.

5 idées clés que j’en retiens personnellement :

  1. Le décalage entre formation initiale et emploi réel est massif . Seuls 30 % des actifs exercent un métier en lien avec leur domaine de formation. Une donnée qui questionne frontalement notre manière d’interpréter la valeur d’un diplôme.

  2. Le diplôme fonctionne moins comme preuve de compétence que comme signal ou rituel de passage. Il rassure, balise, classe… mais ne garantit pas grand-chose sur les compétences réelles, ni leur adéquation aux besoins actuels des organisations.

  3. L’élévation du niveau de diplôme dévalorise progressivement sa valeur marchande. L’inflation des diplômes génère un phénomène de « surqualification perçue », mais souvent sans amélioration proportionnelle des conditions d’emploi.

  4. Le diplôme reste néanmoins un marqueur social puissant. Il continue à légitimer des inégalités d’accès, parfois au détriment de talents réels mais non « certifiés ». L’exemple des femmes diplômées dans des secteurs masculins est particulièrement frappant.

  5. La montée des compétences transversales (« soft skills ») bouscule la logique du diplôme comme référentiel unique. Une opportunité pour repenser l’évaluation, la valorisation et la construction des parcours professionnels dans une logique plus dynamique.

Cet article interpelle quiconque recrute, développe ou réoriente des talents – autrement dit, tout dirigeant ou professionnel en transition mais aussi tout jeune en formation ou en recherche d’orientation et fondamentalement tout notre système d’enseignement et de formation.

Des questions que nous pourrions nous poser :

  • Ne devrait-on pas nous interroger sur notre propre rôle dans le maintien de cette fiction collective autour des diplômes ?

  • N’est-ce pas aussi à nous, dirigeants et managers, de redéfinir les critères de valeur au sein de nos organisations ?

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Contre les solutions toutes faites : l’héritage vivant de François Dupuy.

 

Un grand merci à Nicolas MARIOTTE pour cette mise en lumière précieuse des travaux de Francois Dupuy, dans la continuité de ceux de Michel Crozier. Pour ma part, je placerais « la connaissance précise du terrain » et « l’intelligence des acteurs » (laquelle découle directement de la première) non « pour finir », mais comme point de départ fondamental de toute création de savoir, fidèle à l’esprit de ce que François Dupuy appelait « la connaissance élaborée ».

 Une critique lucide de la pensée managériale contemporaine

@Nicolas Mariotte rappelle combien @François Dupuy dénonçait l’appauvrissement de la pensée managériale, alimenté par les solutions prêtes à l’emploi, proposées par les écoles de commerce et les cabinets de conseil.

Ayant eu l’honneur et le plaisir de travailler trois ans aux côtés de François Dupuy chez Mercer Delta — qu’il dirigeait alors — et ayant ensuite entretenu avec lui des relations proches, j’ai eu le privilège de l’interviewer à l’occasion du 150ᵉ numéro de RéSolutions Hebdo.

La fidélité aux sciences sociales : un combat difficile

Lors de cet entretien, alors qu’il y regrettait le faible investissement des cabinets de conseil dans la production de connaissance, au profit de « modèles pré-élaborés », je lui rappelai qu’il avait lui-même dirigé un cabinet de conseil. Voici la réponse qu’il me fit :

« Le cabinet que j’ai dirigé était entièrement tourné vers les sciences sociales (ou comportementales) appliquées au conseil. C’est une position que le fondateur de ce cabinet, ensuite intégré au groupe Mercer, n’a pas pu tenir longtemps. Petit à petit, il s’est « normalisé » et les approches spécifiques qu’il avait développées se sont progressivement estompées au profit des pratiques classiques du conseil. »

Il nous livrait là un témoignage précieux sur la difficulté de résister à la pression du marché.

 Le piège du « solutionnisme »

Cette remarque ouvre une autre question, qui mériterait à elle seule une véritable « connaissance élaborée » : celle du tropisme « solutionno-centré » des cabinets de conseil et des écoles de commerce, qui répond lui-même à une demande similaire des entrepreneurs, avides de solutions clés en main.

Comprendre et dépasser cette quête de solutions faciles

Il y a là la matière à une connaissance qui reste à élaborer et à dépasser de cette préférence. Elle me semble essentielle et incontournable pour la dépasser. C’est là me semble-t-il que devrait en priorité porter les travaux des sociologues de l’organisation. En bon stratège, il convient toujours, une fois posée le « Futur voulu » de s’attaquer à l’identification du « rocher qui fait obstacle sur votre route » et d’identifier les moyens de le dépasser.

Ensemble, réhabilitons la pensée complexe

À l’heure où la tentation des raccourcis est grande, inspirons-nous de l’exigence intellectuelle que nous a légué Francois Dupuy uy pour remettre la connaissance élaborée au cœur de nos pratiques. Continuons ensemble à questionner, comprendre, penser — avant d’agir.

Pour prolonger la réflexion

Je vous invite à (re)découvrir les trois interviews accordées par Francois Dupuy à RéSolutions Hebdo pour nourrir cette réflexion fondamentale sur la réalité et l’avenir du management.

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Changer de regard pour se changer et changer le monde.

Vers une écologie de l’esprit : voir autrement

Quel beau titre que celui du livre majeur de Grégory Bateson (1977) « Vers une écologie de l’esprit ».

Merci à David BOSSARD sard pour le partage de l’article de J Besse Le niveaux logiques de Gregory Bateson : penser le changement autrement, qui met brillamment en lumière cette formule essentielle :

« Il ne s’agit pas de pousser l’autre au changement à tout prix, mais d’ouvrir un espace où plusieurs lectures deviennent possibles. Car ce qui compte au fond, ce n’est pas tant d’avoir raison que de pouvoir voir autrement. »
Cette remarque est une boussole pour moi, autant dans mes réflexions personnelles que professionnelles. Elle me parait essentielle dans mon activité de conseil.

Comprendre le changement par les niveaux d’apprentissage : un changement de cadre

Dans ce livre Gregory Bateson ne nous livre pas une simple théorie de l’apprentissage, mais une véritable cartographie des transformations possibles d’un être vivant.

Bateson décrit quatre niveaux d’apprentissage et donc de transformation, allant de l’apprentissage 0 (réponse automatique) jusqu’à l’apprentissage 3, véritable bascule existentielle qui opère une transformation profonde du système de pensée. Ces niveaux offrent un précieux cadre d’observation de nos réactions et de leur potentiel d’évolution.

Créer les conditions du changement

Comme le rappelle J. Besse :

« Ces niveaux ne sont pas que des abstractions philosophiques : ils ont des implications très concrètes en thérapie systémique (et en gestion du changement) »
Le changement systémique ne vise pas simplement à corriger des comportements, mais à créer les conditions d’un changement de perspective, pour faire autrement plutôt que mieux.

Bateson montre que l’essentiel ne réside pas dans l’amélioration d’un comportement, mais dans le changement de cadre qui le rend possible. C’est ce que vise la thérapie systémique : non pas réparer l’ancien, mais permettre l’émergence de nouvelles façons de faire, de penser, d’être avec l’autre.

Un appel essentiel : voir autrement

Ce qui compte, ce n’est pas tant d’avoir raison que d’apprendre à voir autrement. Ce fil rouge traverse toute approche systémique du changement et invite à une véritable ouverture.

L’intelligence des acteurs : comprendre avant d’agir

Pour ma part, il me parait important et pertinent de combiner cette approche avec le concept sociologique d’« intelligence des acteurs » – comprendre les bonnes raisons qu’a l’autre d’agir comme il le fait – et de nous offrir ainsi des outils précieux pour accompagner les dynamiques de changement.

Les risques du changement rapide

Soyons conscients que tout passage à un niveau supérieur implique un moment de désorganisation. Cela peut être inconfortable, voire douloureux. D’où l’importance d’une posture d’écoute et de prudence : il ne s’agit pas de bousculer, mais d’ouvrir un espace où d’autres lectures deviennent possibles.

Remarque sur l’illustration

Je me permettrais un léger regret concernant l’illustration choisie : une progression de perspectives aurait mieux traduit la richesse des niveaux décrits par Bateson, plutôt qu’une simple répétition infinie du même geste.

Plutôt qu’un peintre se voyant peindre à l’infini, une progression de perspectives aurait été plus fidèle à l’esprit de Bateson :

Le peintre se voyant peindre
Un autre peintre le peignant
Le premier peignant le second en train de le peindre
…et une ouverture sur l’inattendu.

Et maintenant ?

Dans une époque où tout pousse à la performance et à la certitude, Bateson nous invite à une forme d’humilité cognitive. Et si nous faisions une pause pour regarder nos propres cadres de pensée ? Car voir autrement, c’est déjà changer.

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