Vers une Science de l’Action Efficiente : Redéfinir l’Organisation

La quête d’un nom

Jean-Philippe Bouilloud et Ghislain Deslandes s’interrogent dans leur article « De quoi notre métier est-il le nom ? » Perspectives pour un débat »  sur le nom qu’il conviendrait de donner à la recherche en gestion. L’article est une invitation à la discussion et je remercie ses deux auteurs de nous l’avoir lancée. La question mérite d’être posée et a tout son sens. Les auteurs, au terme d’une analyse argumentée, aboutissent au terme d’ « Organologie » comme proposition de nom. Ce terme a en effet le mérite de centrer le domaine de recherche à celui des organisations.

L’Organologie : une proposition pertinente mais incomplète

Cette interpellation convoque une série de questions auxquelles j’ai été moi-même confronté en plusieurs occasions, à la fois en tant que conseil en « organisation » que de praticien en tant que directeur de l’Organisation d’un grand établissement bancaire et d’enseignant.

J’ai, en son temps, eu la responsabilité de créer une direction de l’organisation dans un grand établissement bancaire et il m’a fallu nommer cette direction. Comme à l’occasion de tout baptême d’une … organisation, le nom à lui donner pour avoir un sens et du sens doit refléter le sens de la mission que cette organisation doit remplir. Elle ne peut et donc ne doit se faire qu’une fois cette mission clairement posée et définie.

L’Action et l’Efficience : au cœur de la gestion

Dans mon cas, il était clair que la finalité que je voulais donner (en accord étroit avec son Directeur Général) à cette direction était celle d‘un support à l’action et à l’efficience des acteurs.

A tel point que, au moment de la baptiser, j’ai un moment pensé à « Direction de la Logistique » qui rendait bien pour moi sa mise au service de la réussite de l’action. J’ai finalement opté pour « Direction de la Logistique et de l’Organisation ». Un tel ordre me permettait d’éviter « Direction de l’Organisation et de la Logistique » qui aurait donné les initiales DOL de funeste résonance.

L’Organisation c’est l’art de l’Organisation. Qui pourrait le démentir ?

La question s’est reposée lorsque j’ai dû intituler un de mes enseignements officiellement labellisé « Organisation du travail », J’ai tenu à officieusement le présenter à mes étudiants comme un cours … d’entrepreneuriat. Ce qu’il était de fait. Et cela non pour me hausser du col mais bien pour nommer du bon nom la finalité de ce cours.

Toute action est une entreprise et l’organisation a pour finalité d’assurer au mieux le bon aboutissement de l’action. Le fait que lorsque vous cherchez à faire comprendre ce qu’est l’organisation (la discipline) vous vous entendez dire « l’organisation c’est l’art de l’organisation », vous avez vite compris que la polysémie c’est beau comme la polyphonie dans un chant corse mais que, en terme pédagogique, cela ne vous mène pas bien loin.

L’Actionologie : une nouvelle perspective

Aussi je suis intimement convaincu que la science de gestion n’a pas (et ne doit pas) être conduit aux fonts baptismaux par son parrain «  l’Organisation ». Et c’est un conseil, un dirigeant et un enseignant en … organisation pendant plus de 35 ans qui vous le dit !

Alors oui Organisation lorsque j’écris ton nom je t’inscris sous un autre nom et c’est bien autour des dénominations d’ «Entrepreneuriat » et d’Action » que je recherche ton nom.

Une organisation a mission, dans son sens premier d’organe, d’assurer dans ses meilleurs conditions la fonction qu’elle a pour raison d’être d’assurer. La finalité de l’organisation et de la gestion est l’efficience de l’action. Aussi, selon moi, ce n’est pas l’organisation qui est, et doit être au centre des sciences de gestion mais bien l’action et son efficience.

La Praxéologie : une approche théorique et philosophique

Le nom propre à la science de l’action est la Praxéologie. Ce n’est pas un nom à porter si l’on ne veut pas se faire moquer dans la cour de récréation par ses petits camarades qui eux ont des noms reconnus comme Sociologie, Management, Psychologie, Philosophie, …. Et cela d’autant moins qu’il est souvent associé à l’école autrichienne d’économie, et notamment aux travaux de Ludwig von Mises, souvent décriés comme une approche théorique et philosophique plutôt qu’une science empirique.

Vers une Science de l’action efficace

Aussi la recherche du nom devrait selon moi porter non sur un dérivé de l’Organisation mais bien de l’Action voire de l’Entrepreneuriat.

Alors pourquoi pas « Actionologie » ? Ce n’est pas très beau mais pas moins que « Organologie » mais qui respecte en tous points la grille d’analyse et le cahier des charges posé et appliqué par les auteurs de l’article et qui les ont conduit au terme d’ « Organologie ». (entre autres sa possible traduction et compréhension aisée dans d’autres langues et son caractère « auto »porteur de sens.). La seule différence (mais elle est de taille selon moi) porte au final sur la clé de voute de cette recherche qui est bien selon moi l’efficience de l’action. Ce terme a l’avantage de ne pas privilégier une discipline mais bien la recherche d’une finalité.

Une Actionologie qui au final, bon prince, fait sa place à l’Organologie

Je viens d’avoir le plaisir de commenter un article intéressant de Frank Kumli « A Designer, an Ecologist and an Entrepreneur Walk into a Bar: How Different Disciplines See, Think and Act! …. ». j’ai intitulé ce court article « La complémentarité des disciplines ; une clé pour comprendre et changer le monde monde » et l’ai sous titré « Comprendre le réel pour mieux le changer ».

En écho à ce que j’écris dans cet article je devrais reconnaître que l’Actionologie pour laquelle je milite intégre de multiple disciplines parmi lesquelles je dois bien reconnaître une place à … l’Organologie. Mais la question posée par l’article de Jean-Philippe Bouilloud et Ghislain Deslandes est de savoir comment nommer les sciences de gestion. L’Actionologie selon moi est l’appellation qui recouvre l’ensemble des disciplines du domaine de l’efficience de l’action bien davantage que l’ »organisation » qui n’en n’est qu’un des instruments parmi tant d’autres.

A qui la parole ?

La discussion  a été ouverte fort à propos par Jean-Philippe Bouilloud et Ghislain Deslandes que je remercie vivement pour cet article. Elle reste ouverte à qui veut s’en emparer. Je passe le bâton de parole à qui veut le prendre. Bien cordialement, Louis.

 

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