Ayons l’intelligence de nos situations.

RéSolutions

« Ce n’est pas en refaisant toujours la même chose que l’on obtient un changement » dit l’adage.

Encore faut-il :

1. être conscient du moment où un changement est devenu nécessaire,

 2. savoir quel est ce changement à mettre en œuvre et enfin,

3. vouloir réellement ce changement.

Excusez du peu. Comment s’étonner alors que « la même chose » persiste jusqu’à disparaître par inadaptation et suffocation finale.

C’est dans sa confrontation au réel que notre action sculpte notre réalité.

Veillons

  • à être le sculpteur et non le sculpté.
  • à marteler notre réalité en devenir et à écouter et ressentir, en écho, sa réponse pour, attentifs à l’évolution de son bloc ce marbre, adapter notre prochain coup de ciseau.

A défaut, nous risquons d’être le bloc sur lequel la réalité martèle ses coups. Un bloc que cette réalité aura tôt fait de réduire à un inexistant tas de poussière.

 A défaut de tenir compte de la réaction de notre environnement à nos actions nous en subiront inéluctablement la main mise, une main mise qui nous prenant par la main nous conduit inéluctablement à notre effacement.

Interrogeons-nous sur nos talents de sculpteur. Reconnaissons que rares sont les Michel Ange que nous croisons y compris devant notre glace le matin en nous rasant ou en nous maquillant.

Le REX par le retour d’Expérience qu’il nous offre est le burin indispensable pour façonner notre évolution et pour décider de notre prochain coup de ciseau.

De même que Michel Ange aurait été bien démuni devant son bloc de marbre, sans burin ni ciseau pour sculpter son Apollon, nous le sommes, nous-mêmes, devant notre réalité si nous avançons privés et démunis d’outils adaptés.

Le REX est un de ces outils. Un outil simple et puissant trop souvent ignoré.

Il est un outil simple et puissant de communication avec la réalité.

Faire un Rex est tout simplement communiquer avec son environnement, de dialoguer avec le réel dans une écoute attentive et de lui répondre par une réponse adaptée.

Et pourtant, combien de fois avons-nous butté sur une difficulté non prévue, tout confiants que nous étions dans la pertinence de notre idée ou de notre plan, et avons-nous du, soit y renoncer, soit l‘adapter face aux contraintes et difficultés rencontrées. Combien de fois nous sommes-nous jurés que l’on ne nous y reprendrait plus ? Et combien de fois nous sommes-nous ensuite heurtés aux mêmes difficultés ?

Comment avons-nous alors réagi ? Sommes-nous restés dans la réaction bien souvent émotionnelle ou avons-nous agi réellement au sens premier du terme, c’est à dire en tenant compte du réel et de sa réalité ?

Bien souvent, nous repassons à l’action sans avoir pris le temps d’analyser et d’intégrer les raisons de l’échec ou de la difficulté rencontrée et repartons à l’assaut sans questionnement ni remise en question de notre action et de notre façon d’agir.

Et pourtant, combien sommes-nous à nous être promis, pour prendre le cas de l’entreprise, de faire un REX (Retour d’expérience)  des principaux projets programmés ? Voire combien sommes-nous à avoir inscrit dans nos process d’entreprise le REX comme étape salutaire de tout projet ? Si par extraordinaire nous l‘avons prévu, combien sommes-nous à oublier systématiquement cette étape pour nous précipiter sur le prochain chantier ou projet sans prendre le temps de faire le bilan du projet terminé nous privant ainsi de tous ses enseignements ?

Un tel constat interroge.

Alors même que les avantages à faire un tel bilan et à en tirer les enseignements sont évidents à tous, cette absence généralisée de REX pose de vraies questions :

1.      Quelles peuvent en être les raisons ?

2.      Quels moyens pour rendre naturel ce qui, à l’évidence, ne l’est pas ?

3.      Comment en développer la pratique ?

1.      Le REX, outil de dialogue est une démarche qui n’est ni naturelle ni culturellement ancrée dans nombre de nos modèles mentaux. Elle est une démarche exigeante d’ouverture et de décentration.

A bien y regarder, le REX par sa dimension de dialogue et de communication se heurte aux difficultés traditionnelles de l’art de communiquer.

Le REX se heurte, comme toute communication, à la difficulté d’écouter ce que l’autre dit et d’en tenir compte.

L’écoute est (ou devrait être) la première dimension de la communication. « A bon entendeur salut ! ». Une écoute réelle qui permette d’entendre et d’accepter au sens d’intégrer ce qui nous est dit. C’est parfois bien dur, tant nous avons tendance parfois d’être … « durs de la feuille ».

De plus, circonstance aggravante, le REX porte les stigmates de valeurs négatives qui lui sont attachées et au final fait peser sur nous les affres existentielles d’une éventuelle remise en cause.

Une dimension négative est souvent attachée au REX dans les imaginaires.

Les perceptions attachées au REX peuvent expliquer pour une large part nos réticences à le pratiquer : l’erreur, la correction et fondamentalement une notion de faute qu’il nous faut avouer et corriger. Il n’est pas, dès lors, étonnant qu’on l’oublie et préfère passer notre chemin sans nous arrêter et faire une pause qui nous permettrait de savoir si nous sommes sur le bon chemin.

Une menace de remise en cause existentielle nous tient souvent éloigné de sa pratique.

Au-delà de cette posture peccamineuse, un autre frein survient face au REX : le fait de remettre en cause ses façons de faire. Faire le constat que l’action comme on la menée doit être modifiée et qu’il nous faudra éventuellement modifier nos façons d’agir est un exercice difficile et n’ayons pas peur du mot, quasi existentiel.

2.      Quels moyens pour rendre naturel ce qui à l’évidence ne l’est pas ?

REX et Feedback : même combat et … même handicap pour monter sur le podium de nos habitudes naturelles.

Un REX est le feedback que les événements font de notre action.

Aussi, le REX connaît-il les mêmes difficultés qu’un feedback trop souvent oublié et trop souvent mal pratiqué quand il l’est. Le REX comme le feedback est trop souvent un jugement porté par celui qui le fait et trop souvent vécu comme une critique par celui qui le reçoit.

Comme le feedback, le REX est et doit être, un cadeau fait à notre action et nous gagnons à le considérer et l’accepter comme tel.

Aussi, nous gagnerons ce cadeau, en prenant le temps d’y consacrer une partie de notre temps, de notre attention et de notre énergie.

Le REX prenons le pour ce qu’il est : un feedback, le cadeau que les situations vécues nous offrent.

Remettre en question son action est précisément questionner son action et ses modalités et prendre la mesure de son adaptation à l’objectif que l’on s’est fixé à la lumière de la situation dans laquelle nous avons mené cette action.

Questionnons nos actions et écoutons les réponses que leur mise en œuvre nous a apportées.

C’est précisément l’objet du retour d’expérience et tout son profit. Or que constatons nous : combien de temps consacrons nous à faire le bilan et l’analyse d’une action. Nous nous privons par là d’une richesse extrême qui nous permet de grandir dans notre capacité d’agir et de contribuer.

Ayons un autre regard sur ce besoin d’évoluer. Ce n’est pas notre être qui est en cause.

Ce qu’il convient d’observer dans un REX c’est notre « être en situation » et de nourrir cet « être en situation » des enseignements de la situation que nous avons rencontrée. En quoi notre action a été ou non adaptée à la situation et à sa réalité ? En quoi notre action future gagnera en en tenant compte ?

Cet autre regard porté sur nos situations exige une posture particulière qui permet de mettre la situation au centre de notre attention et non pas nous en tant qu’acteur soit fautif et contrit soit en héros dressé sur le podium et prêts à donner des leçons au monde entier.

Ce qui importe c’est d’analyser la situation telle qu’elle s’est déroulée, une situation qui a été la rencontre d’une intention (la nôtre, portée voire trahie par votre action) et de l’environnement dans lequel cette action a agi et des effets que cette action a produit.

La question n’est pas de savoir qui a bien ou mal agi mais de constater factuellement les effets produits.

Sont-ils conformes à l’intention qui a porté l’action ? Cette simple question nous (r)amène, parfois (souvent ?) à nous questionner sur cette intention. Au fait, quelle était l’intention ? Etait-elle clairement définie ? Était-elle claire ? A-t-elle même été énoncée et partagée entre les acteurs ?

Avons-nous clairement identifié la réponse de notre environnement en lui donnant la parole et la sollicitant ? Avons-nous compris réellement la nature et le sens de cette réponse ?

Gardons-nous d’accuser la réalité, une réalité trop bête pour nous comprendre, une réalité qui décidément ne comprend jamais rien ! Une réalité qui ne nous mérite pas !

Gardons-nous d’accuser la réalité et de la combattre. Elle gagne tous ses combats par KO contre qui s’y oppose.

Comment ont réagi nos interlocuteurs parties prenantes à notre action et dont on attendait une action précise (achat d’un produit, adhésion à une idée, réalisation d’une action demandée, compréhension et intégration d’un enseignement) ?

Gardons-nous d’un jugement de valeur porté trop souvent sur cette personne qui décidément … n’a rien compris, … qui est décidément trop bête, rétrograde, fainéante, … chacun de nous pourra à l’envie compléter la liste d’épithètes qui nous viennent souvent à l’esprit dans une telle situation.

Ayons l’intelligence de nos situations.

Ayons en tête, la notion d’intelligence des acteurs qui est un des concepts centraux de la sociologie. Un concept simple mais oh combien difficile à intégrer dans nos façons de voir et d’agir. Ce concept tient au fait tout simple que les acteurs – tout acteur – nous comme les autres, sont intelligents. Ils le sont, non en raison d’un QI supérieur, mais du fait qu’ils ont -que nous avons- en toute circonstance, nos bonnes raisons d’agir comme nous le faisons.

La compréhension des bonnes raisons de notre environnement de réagir à nos actions est le point central d’un REX. Elle en marque toute la difficulté et aussi toute la richesse.

 3. Comment développer cette démarche ?

 Y parvenir n’est pas affaire de changement mais bien de transformation. Or, il n’y a de transformation réelle que si elle s’accompagne d’un changement culturel.

Et c’est là que l’on comprend mieux le fait que si un REX est un outil simple il n’est pas simple de l’appliquer. Comme l’affirmait Gaston Berger dans sa belle formule « La simplicité se conquiert »

Prendre le temps de se poser la question de l’efficacité de nos actions et de leurs résultats implique de l’humilité, de l’objectivité (qui est de poser les faits devant soi sans se projeter dans ces faits en tant que sujet), de la prise de recul, une confiance dans l’échange, une autorisation de dire, une bienveillance qui est l’art de bien veiller, de bien voir et de bien donner à voir, une capacité à entendre et à comprendre, une volonté de progresser ensemble par une intelligence collective élargie à l’ensemble des parties prenantes de l’action passée voire idéalement de l’action en cours.

Cela fait beaucoup quand on sait l’individualisme qui est prôné, de fait, par nos modèles psychologique, économiques et sociaux, leur dévotion à l’action et la promotion qu’ils font de l’activisme.

Cela fait beaucoup quand on sait la valorisation des egos et l’auto-proclamation à laquelle chacun est condamné pour faire valoir ses compétences, et ses résultats

Cela fait beaucoup quand on sait qu’évoquer une difficulté rencontrée n’a de valeur que si on s’en fait une gloire en démontrant comment et en quoi on a su la surmonter.

Cela fait beaucoup quand on sait, et en dépit des modes managériales et des slogans à la mode à rebours de la réalité, les difficultés rencontrées bien souvent par les collaborateurs à avoir et à oser prendre la parole en confiance dans un esprit de construction et de contribution.

Donc reconnaissons que :

1.      En dépit de ce qu’affirment beaucoup dans une promesse non tenue, faire un REX n’est ni naturel, ni dans notre culture et que pour ces deux raisons, il est rarement pratiqué

3.      De plus, un REX véritable ne peut se faire et trouver tout son sens et son efficacité que dans un type d’organisation et de fonctionnement bien spécifique qui le suscite, le permette et le valorise.

En conclusion :

il n’est pas neutre de prendre en compte l’autre acceptation du REX en entreprise qui est le Résultat d’Exploitation (REX).

Rappelons que si, dans cette acceptation, le REX mesure la capacité de l’entreprise à générer des ressources et qu’à ce titre il est un bon indicateur de la performance économique d’une entreprise, le REX , dans son acceptation de Retour d’expérience, en est un puissant contributeur.

Enfin et en pensant à tous ceux pour qui « REX » évoque le nom d’un chien policier, rappelons l’ordre qui lui est donné : » cherche, cherche ! l ! ».

Pas de doute que si, à défaut de chercher, nous risquons de ne pas trouver, à force de chercher nous nous donnons de fortes chances de trouver.

Au final, la question est de savoir si nous préférons être Michel Ange ou son bloc de marbre ?

Et s’il nous faut reconnaître que n’est pas Michel-Ange qui veut, n’en restons pas, pour autant, de marbre face à la réalité.

Publié par

Louis Bruhl
Dirigeant chez RéSolutions – Votre futur voulu, résolument
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